La R.N.436 entre Saint-Claude et Lajoux vue sur la table d'orientation de Cuiseaux, qui a été refaite en 1971 (photo: MV, juillet 2009).
Les restes du carrefour d'origine de la R.N.436 au nord de Trévoux (photo: MV, juillet 2018).
Avant Châtillon-sur-Chalaronne (photo: MV, juillet 2018).
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Au col de France (photo: MV, juillet 2018).

A VOIR, A FAIRE

Trévoux: le musée Trévoux et ses trésors raconte l'histoire singulière de Trévoux, qui fut la capitale de la principauté de Dombes; la salle du Parlement de Dombes, installée dans le palais de justice; l'apothicairerie, établie à Trévoux en 1686, habillée de boiseries XVIIe et XIXe siècles, abrite une collection de pots en faïence; le château-fort, le péage fluvial et la zone frontière avec l'Empire.
Ars-sur-Formans: ce village de la Dombes, reçoit chaque année des milliers de pèlerins qui viennent se recueillir, sur les pas de Jean-Marie Vianney, saint curé d'Ars. On peut visiter la basilique Saint-Sixte, la maison du saint.
Saint-Trivier-sur-Moignans: une belle maison à colombage du XVe siècle; un ancien puit de quartier; la chapelle de Montagneux.
Châtillon-sur-Chalaronne: cette cité médiévale de caractère est classée «Plus beau détour de France»... avec ses halles du XVe siècle, les vestiges de ses fortifications, ses maisons à colombage. Il existe une balade du patrimoine local.
Bourg-en-Bresse: Il est bien dommage de quitter la ville sans avoir visité l'église de Brou (XVIe siècle), joyau gothique construit à l'initiative de Marguerite d'Autriche, veuve du duc de Savoie Philibert le Beau.
Sélignac: la chartreuse; belvédère depuis les roches d’Arnans.
Corveissiat: La grotte et la reculée; l'église de Saint-Maurice-d'Echazeaux; chemins pédestre et point de vue sur la rivière d'Ain.
Thoirette: promenades et randonnées autour de l’Ain. Le lac de Coiselet et le site des pistes à dinosaures de Coisia. Le début, au sud, de la «route du comté» se trouve à Thoirette.
Dortan: ancienne capitale du jeu d’échecs… non loin se trouve Oyonnax et le musée du Peigne et de la Plasturgie. Voir aussi la Route des sapins du Haut-Bugey.
Saint-Claude: la cathédrale Saint-Pierre, Saint-Paul et Saint-André, construite entre le XIVe et le XVIIIe siècle, la maison du Peuple, inaugurée en 1910, abritait une Bourse du Travail, le siège des syndicats, des coopératives de production et des mutuelles, une bibliothèque, un théâtre, un cinéma, un café, un restaurant... Le musée de l'Abbaye est un lieu atypique, situé à l’emplacement exact de l’ancienne abbaye de Saint-Claude (XIe–XVIIIe siècle), dans un écrin de verdure, propose des expositions d’art moderne et contemporain. A voir aussi, le musée de la Pipe, du Diamant et du Lapidaire.
Septmoncel: les fameux «lacets» du XIXe siècle (points de vue), le Chapeau de Gendarme,
Lajoux: plus haut village du massif du Jura, Lajoux est une station familiale d'été et d'hiver (ski, raquettes, randonnées). Maison du Parc naturel régional du Haut-Jura.
Mijoux: station été-hiver. Accès au col de la Faucille. Ski et randonnées sur les hauts sommets jurassiens (panorama sur le lac Léman et les Alpes).
Panneaux indicateurs à Thoirette. Jusqu'à Dortan, la route n°436 historique n'est qu'une chaussée de promenade le long de la vallée de l'Ain (photo: MV, juillet 2017).
Villes et villages traversés par la R.N.436 historique (1959), en italique, les anciennes RN principales croisées:
(Trévoux) (N433, N504)
Villeneuve
Saint-Trivier-s-Moignans
Châtillon-sur-Chalaronne
Neuville-les-Dames
Corgenon
Saint-Denis-le-Ceyzériat
Bourg (N75, N79, N83, N396)
Jasseron
Montmerle
Dhuys
Corveissiat
Conflans
Thoirette
Coiselet
Uffel
Dortan
Lavancia-Epercy
Vaux-les-Saint-Claude
Molinges
Chassal
Lizon (N470)
Etables
La Croix-du-Bar
Saint-Claude (N437)
Rochefort
L'Essard
Septmoncel
Loges-d'Arbey
Lajoux
Mijoux
(La Vattay) (N5)
Plaque touristique indiquant les lieux à visiter dans le Jura Sud. Elle a été photographiée sur la mairie d'Izernore. (photo: MV, juillet 2013).
Peu avant Uffel. (photo: MV, juillet 2018).

Un film (cliquez sur l'image) sur le site decouvrirdortan.com montre la douloureuse réalité du village martyr de Dortan durant la Deuxième Guerre mondiale où périrent plus de trente personnes de la main des troupes allemandes. En novembre 1945, 650 sinistrés retrouvaient un logis dans une cité provisoire. La démolition des ruines et la reconstruction de 141 maisons individuelles à Dortan dura dix ans. Ce site respecte le droit d'auteur et le droit de citation. En cas de problème sur cette citation d'image merci d'en informer au plus vite le réalisateur de Sur ma route.

Sources et documents:
Atlas des grandes routes de France, Michelin (1959); carte n°70 Beaune-Evian, Michelin (1955); carte n°74 Lyon-Genève, Michelin (1925); carte n°91 Environs de Lyon, Michelin (1951); Annales de l'académie de Mâcon, volume 1 et 2, Société des arts, sciences, belles-lettres et agriculture de Saône-et-Loire (1878); Annuaire du département de l'Ain, imprimerie de Milliet-Bottier (1848); Bulletin des lois de l'Empire français, volume 17, Imprimerie impériale (1861); «Bourg-en-Bresse, étude urbaine», P. Cler-Garçon, Les Etudes rhodaniennes (1933); Collection générale des lois, décrets, arrêtés... Impr. royale (1819); Corveissiat, un village du Revermont, ancien mandement de Montdidier: des origines à la Révolution et au delà, Pierre Graff, Musnier-Gilbert (2002); De la corvée en France et en particulier dans l’ancienne Franche-Comté, S.E. Hyenne, J. Jacquin (1862); Dictionnaire géographique, historique, et statistique des communes de la Franche-Comté, Alphonse Rousset, Frédéric Moreau, A. Robert, imprimeur et lithographe (1837, 1854, 1855, 1858); Etudes agricoles sur la Dombes, M. Dubost, Dufour, Martin (1859); Guide Bleu Franche-Comté Monts-Jura, Hachette (1961); Histoire de la navigation intérieure de la France, Joseph Dutens, A. Sautelet (1829); Histoire de la ville et du canton de Trévoux, Jean-François Jolibois, impr. Aimé Vingtrinier (1853); Itinéraire général de la France: de Paris à la Méditerranée, volume 1, Adolphe Joanne, Hachette (1863); Le Léman, voyage pittoresque, historique et littéraire à Genève, M. Bailly de Lalonde, Adolphe Delahays, libraire (1856); Manuel de l'ingénieur des ponts et chaussées, Dunod (1875); Saint-Claude, au fil des ponts et des rues, Véronique Rossi, Les amis du vieux Saint-Claude (2010); Table décennale du bulletin des lois, Imprimerie nationale (1874); bourgenbresse.fr; chatillon-sur-chalaronne.fr; decouvrir-dombes-valdesaone.fr; dortan.fr; mijoux.fr; monumentum.fr; patrimoine.bourgogne-franchecomte.fr; patrimoines.ain.fr; saint-claude.fr; saintdenislesbourg-histoire.fr; Wikipédia; IGN (Géoportail); CartoMundi. Un grand merci aux Guichets du savoir et à la médiathèque de Saint-Claude!

Panneaux indicateurs à Dortan (photo: MV, juillet 2018).
Borne kilométrique de la D436 à Vaux-les-Saint-Claude (photo: MV, juillet 2018).
Route de Genève à Saint-Claude (photo: MV, juillet 2018).
Le Saut du Chien, après Saint-Claude (photo: MV, juillet 2009).
Témoignage de M. Bailly de Lalonde, dans l'ouvrage Le Léman, voyage pittoresque, historique et littéraire à Genève, sur la traversée des Monts-Jura, à partir de Sainte-Claude au milieu du XIXe siècle: «Je me mis en route pour Genève à cinq heures du matin, accompagné d'un guide qui s'était chargé de porter mon bagage. Nous entrâmes, au sortir même de Saint-Claude, dans une longue chaîne de montagnes escarpées, à peine accessibles aux meilleurs piétons. J'avais préféré ce triste chemin au lieu de la grande route, qui est loin d'être aussi mauvaise, et que l'on m'avait conseillé de prendre. (...) On ne saurait se faire une idée de la difficulté de ce passage, qui ne mérite même pas le nom de sentier; je marchais partout sur des monts escarpés, sur des côtes très rapides et presque taillées à pic. (...) Après avoir marché pendant plus de deux heures, nous arrivâmes à Sept-Moncel, où l'on fabrique d'excellents fromages... (...) Nous rencontrâmes, à deux lieues de Sept-Moncel, le village de Mijoux, qui donne son nom à une belle vallée, où l'on trouve plusieurs granges éparses à travers de vastes prairies. (...) Nous arrivons à la Faucille, où l'on cesse enfin de monter. Jusqu'alors, et depuis notre départ de Saint-Claude, nous n'avions fait que gravir des montagnes ou des rochers». 
Entrée de Lajoux. Le Haut-Jura s'annonce à nos yeux (photo: MV, juillet 2018).
Borne des limites Jura-Ain à Mijoux (photo: MV, juillet 2018).
Carrefour de la R.N.436 historique (D936) avec la route du col de la Faucille, la R.N.5 historique, D1005 (photo: MV, juillet 2018).

Belles routes de France
R.N.436: LA ROUTE QUI S'ENLACE AUTOUR DU JURA
La route nationale 436 de 1959, qui grimpe de la Bresse au Jura en passant par Bourg et le Revermont, est connue sur les anciennes cartes postales pour les «lacets de Septmoncel», une route de tourisme célèbre dans les années trente à cinquante, qui rudoyait les mécaniques entre Saint-Claude et le Haut-Jura… Aujourd’hui déclassée dans l’Ain en D936 et en D436 dans le Jura, elle passe joliment de la plaine à la montagne jusqu’au fameux col de la Faucille dont elle fut longtemps un des accès historiques. La promenade a été faite durant l’été 2018, au plus fort de la chaleur… C’est dire si l’accès aux cimes jurassiennes a été une bénédiction en fin de journée!

La route n°436 historique, toute droite dans la plaine bressane (photo: Marc Verney, juillet 2018). En cliquant sur cette image vous avancez vers la R.N.5 au col de la Faucille . Pour retourner sur la home: cliquez ici.

Le point de départ exact de la R.N.436 historique se situe à côté de Saint-Didier-de-Formans, non loin de Trévoux. Le carrefour a fortement évolué, se transformant aujourd’hui en un rond-point «bien élevé» (dans la norme, quoi…), où déjà se presse l’intense circulation périphérique lyonnaise… L’enjeu, dans la région, c’est la traversée de la Saône. Car Trévoux se trouve à l’amorce d’une vaste boucle de la rivière, sans lien évident avec la rive droite. Or, lit-on dans l’Histoire de la ville et du canton de Trévoux, on inaugure un pont suspendu à Trévoux le 18 mai 1851 seulement. Celui-ci ouvrira «une communication avantageuse avec le Lyonnais et le Beaujolais». La première pierre avait été posée l'année précédente. L’autre pont de la région, à Saint-Bernard, en face d’Anse, est un peu plus ancien: c’est une ordonnance de 1834 qui en ordonne la construction et il est achevé en 1838. On imagine assez aisément que ces ponts seront reliés rapidement avec l’arrière-pays… D’autant que la qualité des chemins dans la Dombes posait problème. «Un système complet de viabilité était pour la Dombes un besoin de premier ordre, écrit l’ingénieur Dubost dans son ouvrage Etudes agricoles sur la Dombes. Depuis 1837, plusieurs chemins de grande communication ont été classés, et l'un d'eux a même été converti en route impériale, un autre en route départementale. Le gouvernement, qui a tant fait pour la Dombes depuis quelques années, a étendu ce système: il fait procéder à l'exécution d'un réseau de chemins qui diviseront ce pays comme un damier»... Le nouveau Service spécial de la Dombes crée ainsi, en 1854 et 1869, une trentaine de nouvelles routes agricoles pour une longueur totale d’environ 350 km de chaussées. «Les communes intéressées fournissent les terrains et exécutent les terrassements; l'Etat construit les ouvrages d'art et la chaussée d'empierrement», indique le Manuel de l'ingénieur des ponts et chaussées de 1875.

Avant Ars-sur-Formans. Les premiers kilomètres de la D936 se déroulent dans une nature quasi entièrement domestiquée par l'homme (photo: Marc Verney, juillet 2018).

C’est en arrivant au nord de Sainte-Euphémie que l’on retrouve une chaussée sur les anciennes cartes. En 1819, cette voie, qui est déjà dessinée –mais bien plus sinueuse- sur la carte de Cassini du XVIIIe, est numérotée route départementale n°3, «de Bourg à Lyon, par Neuville, Châtillon, Sainte-Euphémie et Trévoux» dans la Collection générale des lois, décrets, arrêtés. Plus tard, ce sera aussi le chemin de grande communication n°29. Sur la carte du XXIe siècle, la D936 tire droit sur Villeneuve, délaissant, à droite, Ars-sur-Formans, une localité desservie par la route n°504 (D904). La carte de Cassini (XVIIIe) nous montre un autre schéma: une voie part de Beauregard, sur les bords de la Saône, en rencontre une autre (D28 actuelle) partant de Sainte-Euphémie et remonte, en se «tortillonnant» dans la campagne, vers Villeneuve. C’est très certainement l’actuel «chemin du Bief». Quoi qu’il en soit, la chaussée toute droite est déjà dessinée sur la carte d’état-major de 1841 publiée par CartoMundi. On pénètre dans Villeneuve par la «route de Villefranche». Le lieu, connu depuis le XIe siècle, porte ce nom en raison –sans doute- des grands défrichements des XIIIe et XIVe siècles. Précédemment rattaché à la Savoie, Villeneuve est cédé au royaume de France avec l’ensemble de la Dombes en 1762. Sept kilomètres plus loin, voilà Saint-Trivier-sur-Moignans. Un village bien fortifié, puisqu’au XVIIe siècle, les remparts étaient équipés de quatorze tours, trois portes, et entourés de fossés… Le tout sera partiellement détruit en 1793 (monumentum.fr).

R.N.504: PETITS VIRAGES ENTRE AMIS
Entre Roanne et la Savoie, la route nationale 504 historique traverse des paysages qui nous sont chers... Beaujolais, Bresse, Bugey, Alpes... (lire)

Dans la région, plusieurs de ces plaques sont visibles, indiquant les noms des villages (photo: Marc Verney, juillet 2018).
Le pont sur la Chalaronne à Châtillon (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Ce sont moins de huit kilomètres –toujours en ligne droite- qui nous séparent maintenant de Châtillon-sur-Chalaronne. Mais ces quelques arpents de terre suffisent à nous faire passer du côté de la Bresse, qui elle, est rattachée au royaume de France en janvier 1601, suite au traité de Lyon entre les Savoyards et Henri IV. L’histoire de Châtillon remonte cependant à plus loin… Ici, explique le site chatillon-sur-chalaronne.fr, «les Romains ont laissé quatre voies commerciales et stratégiques dont la première à l’est mène à Saint-Paul-de-Varax en passant par Marlieux, la seconde au Nord conduit à Bourg-en-Bresse, la troisième au Sud traverse Saint-Trivier-sur-Moignans pour aller à Trévoux et la dernière à l’ouest amène à Belleville». Avant l’an 1000, «la ville de Châtillon-sur-Chalaronne n’existe pas encore», raconte cependant de son côté le site patrimoines.ain.fr. Après avoir appartenu aux seigneurs de Montmerle et Beaujeu, la ville, situé au confluent de la Chalaronne et du Relevant, passe sous domination savoyarde à partir du XIIIe siècle. Une enceinte de mille mètres en briques ceinturait alors les maisons. C’est à ce moment que le commerce de la ville a prospéré, notamment grâce à sa position avantageuse sur les chemins de Lyon, Bourg-en-Bresse et Villars, mais aussi à ses nombreuses foires et marchés alimentaires et à son artisanat très actif. Le rattachement à la France, au début du XVIIe siècle, n’affecte en rien l’activité marchande de Châtillon. Si, aujourd’hui, la D936 contourne les murs de la ville, en 1959, notre chaussée y entrait par le boulevard de la Résistance (D17) et en sortait par l’avenue Charles-de-Gaulle. Celle-ci longe l’hippodrome de Bel-Air, créé en 1863.

A L'Etoile, commune de Montracol (photo: Marc Verney, juillet 2018).
Ancienne plaque de cocher vers Corgenon (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Sur les 23 km séparant Châtillon de Bourg (tout comme entre Ars et Châtillon), le voyageur empruntant le G.C.29 au début du XXe siècle côtoyait la ligne de tramway Jassans-Bourg, active entre 1898 et 1937. Celle-ci se trouvait, la plupart du temps, sur l’accotement de la route. On passe Neuville-les-Dames, une localité créée au XIIIe siècle suite à la destruction du village original, à 600 m de là (vers le lieu-dit la Poipe). Ici, on y a «écrété» la montée, mentionne, en 1848, l’Annuaire du département de l'Ain. Dès la sortie de la localité, la «route de Bourg» part en ligne droite en direction du chef-lieu du département de l’Ain. Heureusement que l’on rencontre, ici et là, de longs alignements d’arbres en bordure de chaussée… Ceux-ci procurent ombre (en cet été caniculaire) et dessinent le tracé de la chaussée dans le paysage ondulé et peu spectaculaire de la Bresse. Notre voiture entre dans Corgenon par la «route de Trévoux». Le «chemin du Contour» y est sans doute à la base de la rectification signalée dans l’Annuaire du département de l'Ain de 1848 et encore bien visible sur la carte Michelin n°74 de 1925. Dès Saint-Denis-lès-Bourg, l’aire urbaine de Bourg-en-Bresse nous happe. Ce village, mentionné dès le XIe siècle, s’est appelé Saint-Denis-le-Ceyzériat jusqu’en 1932. Au XVIIIe siècle, «la paroisse est traversée par la nouvelle route royale» menant à Neuville-les-Dames écrit le site saintdenislesbourg-histoire.fr.

R.N.75: LA "GRIMPEE" DES ALPES
C'était, dans les années soixante, la route des Parisiens se précipitant dès les premières neiges à l'assaut des stations de ski des Alpes... (lire)

R.N.79: DU CHAROLAIS AU JURA
En 1959, la route nationale 79 nous conduit de Nevers à La Cluse sur la commune de Montréal-la-Cluse dans le département de l’Ain (monts du Jura). Des paysages plein la vue!(lire)

R.N.396: DELICES DE BOURGOGNE...
Voilà une route qui vous surprendra! Une vraie promenade de plus de 300 km sur un axe qui mérite le label "route buissonnière" (lire)

Puis c’est l’entrée dans le centre-ville de Bourg-en-Bresse après être passés sous les voies du chemin de fer. La ville, qui est aujourd'hui le chef-lieu du département de l'Ain s'est développée, nous explique le site patrimoines.ain.fr, «à la croisée des grandes régions naturelles du département: Bresse, Dombes et Revermont, et au carrefour des grands axes routiers et ferroviaires conduisant à Lyon, Mâcon, Genève ou Paris». Durant la période gallo-romaine, il y a deux zones d’habitat: un village à Brou autour d’un fanum (terrain ou édifice consacré aux divinités) et un fortin, transformé ensuite en château. Les sires de Bâgé s'y implantent au XIIIe siècle. En 1272, le mariage de Sybille de Bâgé et du comte Amédée de Savoie fait rapidement passer Bourg sous la coupe de la Maison de Savoie (sauf lors d’un bref intervalle entre 1536 et 1559). Dès lors, la ville se dote de puissantes défenses: trois enceintes fortifiées protègent les habitations autour du château féodal. En 1560, lit-on encore sur le site patrimoines.ain.fr, le duc Emmanuel-Philibert de Savoie, qui fait face au roi de France, lance la construction d’une vaste citadelle «de forme pentagonale avec de larges fossés et des angles renforcés par cinq bastions». En 1601 pourtant, Bourg basculera du côté du royaume de France… Au XVIIIe siècle, découvre-t-on sur le site bourgenbresse.fr, «la ville se transforme radicalement au cours du règne de Louis XV: les marécages sont asséchés, les rues sont pavées et éclairées, les remparts sont abattus et de nouveaux bâtiments sont édifiés». Au XIXe siècle, la ville est reliée au réseau ferré en 1856 avec la mise en service de la ligne de Lyon-Saint-Clair à Bourg-en-Bresse. Du coup, les quartiers de la gare et de Bel-Air s'urbanisent, la cité double alors de superficie et atteint les 10.000 habitants (Wikipédia). Un boulevard urbain ceinture le centre de Bourg depuis les années 70. Il n'est donc pas difficile d'y retrouver la route du Jura allant vers Saint-Claude. Vers le Revermont, raconte P. Cler-Garçon en 1933 dans l’article «Bourg-en-Bresse, étude urbaine», «depuis le début du XIXe siècle, le faubourg du Jura accompagne sur quelques centaines de mètres la route de Ceyzériat». Aujourd’hui, il faut emprunter l’avenue des Sports (D1083) et obliquer sur la droite pour suivre l’avenue de Jasseron (D936).

STRASBOURG PAR LA R.N.83
Voilà une route qui sillonne l'Est de la France à flanc de collines: Jura, Doubs, Vosges... On n'oubliera pas non plus les vignobles qui s'étalent de part et d'autre du bitume... Une route de gourmet? (lire)

LA ROUTE DES RECULEES...
Du nord au sud du Jura... la magnifique route des Corniches et des Reculées montre une région façonnée par le temps et les éléments. Epoustouflant! (lire).

Peu avant Jasseron, notre voie, dessinée sur la carte de Cassini, (G.C.18 dans les années vingt) frôle un quartier portant le nom de Carronnière. Il s’agit, dans la région, d’un lieu où se fabriquaient les «carrons», de grosses briques de terre cuite très solides, utilisées pour les murs des fortifications notamment. «Au XIXe siècle, la suppression des droits de péage et l’amélioration des moyens de communication permettent l’augmentation de l’usage de la pierre dans l’architecture de la Dombes. Le carron disparaît alors peu à peu», raconte le site decouvrir-dombes-valdesaone.fr... L’avenue du Revermont nous emmène tout droit au centre de Jasseron. Ce village, d’origine moyenâgeuse, passe sous domination royale française en 1601 comme l’ensemble de la Bresse. Au début du XXe siècle, signale jasseron.com, on décide de construire «une ligne de tramway en 1906» entre Bourg et le centre-village. La voie ferrée suit la chaussée principale puis oblique ensuite au nord vers Meillonnas. En 1908, poursuit le site municipal, «les rues de Jasseron bénéficient de l’éclairage électrique». Après Jasseron, la D936 entame son approche du Revermont en se glissant dans le «vallon de France» entre le mont de Sanciat et la côte des Alagniers. Au bout, se trouve le «col de France»… Ce n’est pas grâce à son altitude franchement modeste (370 mètres) qu’on lui a accolé ce nom «prestigieux»… Selon le site bresse-revermont.fr, c'est le «dernier col en venant de la Franche-Comté avant le royaume de France». Enfin, depuis 1601! Non loin, on retrouve d’ailleurs d’anciennes bornes, posées en 1613, qui symbolisaient cette nouvelle frontière, indique encore bresse-revermont.fr. La Franche-Comte ne deviendra française qu’en 1678, annexée par Louis XIV. La route, ici, est toujours dessinée sur la carte de Cassini (XVIIIe siècle) publiée sur le Géoportail de l’IGN.

Après avoir franchi le Revermont et le Suran, la route se dirige vers le village et la reculée de Corveissiat (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Après ce petit col, vers Thoirette, il est nécessaire de détailler, époque après époque, l’itinéraire détaillé de la chaussée… Au XVIIIe siècle, la carte de Cassini montre une voie filant en direction de Simandre-sur-Suran (D98 aujourd’hui), zigzagant au travers de la forêt domaniale de la Rousse par le col du même nom (mention intéressante d’un lieu-dit «vie Blanche»), s’orientant ensuite vers la départementale 42 sans passer par Simandre en empruntant le «chemin de la Rousse». Ensuite, la voie suivait le «chemin de Tournesac» à droite en traversant le Suran dans ce lieu-dit (on y trouvait un moulin). Plus loin, au moulin de la Bouverie, cet itinéraire retrouvait ponctuellement l’actuelle D936 jusqu’à une chaussée passant à gauche de la chartreuse de Sélignac et remontant au nord pour tourner sèchement à droite à la croix Bataillard (D3) et gagner le village d’Arnans. Au sortir d’Arnans, la route, passant entre l’Hôpital et Marsonnas, rejoignait les Meules pour redescendre au sud (D59), sous le château de Montdidier, passer la Valouse, et rejoindre les bords de l’Ain à la Source. Thoirette, n’est, alors, plus qu’à quelques pas… Sur la carte d’état-major du XIXe siècle (1820-1866) publiée par l’IGN, les choses sont encore différentes: depuis le col de France, notre voie file droit (D98) jusqu’au carrefour de la Croix-Beffeau puis tourne à angle-droit vers Montmerle (D81c). Après, cette chaussée «de Bourg à Nantua» se confondait quelques kilomètres avec la R.N.436 historique pour ensuite s’échapper à droite, après le bois de la Crosette (fort virage) vers le lieu-dit «Sur la Côte de Thioles» où elle retrouvait à nouveau le tracé de la D936 d’aujourd’hui. Ayant traversé le Suran au Grand-Marcou sur le pont des Chèvres, la voie reprenait le tracé du XVIIIe jusqu’à Thoirette. Sur la carte d’état-major de 1951, la R.N.436 quitte le col de France par une chaussée différente des tracés des XVIIIe et XIXe siècles et rejoint Montmerle en passant au pied du Grand Mont Charvet. Ensuite, elle dessert Dhuys sans passer par la mini-plaine du Pommier. Après le passage du pont des Chèvres, la route nationale des années cinquante suit un itinéraire entièrement nouveau, à droite de la chartreuse de Sélignac, creusé dans la combe d’Arnans et remontant vers Corveissiat par les Nièvres. De là, l’ancienne R.N. contourne la reculée et descend progressivement vers l’Ain par la côte de Conflans.

A la sortie de Corveissiat, la D936 s'enroule autour de la spectaculaire reculée (photo: Marc Verney, juillet 2018).
Au confluent de la Valouse et de l'Ain. Les eaux sont larges en raison du barrage de Cize-Bolozon (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Sur l’ensemble du tracé jusqu’à Thoirette, une carte datée du milieu du XVIIIe siècle retrouvée par les Guichets du savoir montre que la route initiale, «projetée par Mr de Fleury, (intendant de Lyon, NDLR) doit être ouverte en 1753 et 1754». Les dates des modifications ultérieures de cette chaussée ne sont pas simples à obtenir. On note un décret impérial daté du 14 novembre 1860, qui indique «qu'il sera procédé à la rectification de la route départementale n°6, de Bourg à Nantua, entre Montmerle et le pont de Marcou». Entre le pont de Marcou et Thoirette, la Table décennale du bulletin des lois (1864 à 1873) mentionne un décret de mars 1868 rendant les travaux «d’utilité publique». Quant à la réalisation de la route… il est clair qu’en 1878 les travaux ont déjà été mené depuis quelque temps, puisqu’une étude sur les roches jurassiennes parue à cette époque dans les Annales de l’académie de Mâcon signale «un promontoire rocheux coupé à vif pour le passage de la rectification de la route départementales de Bourg à Nantua». Le livre Corveissiat, un village du Revermont, de Pierre Graff, donne plus de précisions et met aussi le doigt sur l'une des difficultés pour améliorer la route Bourg-Nantua: elle passe «dans le département du Jura qui ne se soucie guère de l’entretenir». Du coup, «le Conseil général de l’Ain finit par s’en émouvoir et préconise en 1835 un nouveau tracé évitant le passage dans le Jura et rejoignant, depuis Sélignat (Sélignac, NDLR), le col de l’Echelle et le territoire de Corveissiat pour redescendre vers Conflans et la vallée de l’Ain. La commune applaudit et promet tout ce qu’on veut pour aider à sa réalisation. Malheureusement, la concurrence de deux autres tracés, l’un par Chavannes et l’autre par Grand-Corent, retardera la construction de la route de Corveissiat jusqu’en 1872».

Ancien panneau en ciment de la R.N.436 conservé à Conflans (photo: Marc Verney, juillet 2018).

On passe maintenant sous le château de Conflans, situé au confluent de l’Ain et de la Valouse. «Edifié au XIIIe siècle par Renaud de Bourgogne, il fut un poste frontière entre Comté et le duché de Savoie» précise le site bresse-revermont.fr. La chaussée traverse un long plan d’eau constitué par la réunion des deux rivières et l’action, en aval, du barrage de Cize-Bolozon, mis en service en 1931. Jusqu’à Thoirette, notre route fait une première incursion dans le département du Jura. Le village de Thoirette se compose, dit le Guide Bleu Franche-Comté Monts-Jura de 1961, «de deux centres, l'un situé à une assez grande hauteur au-dessus de la rivière, l'autre, Thoirette-le-Port, sur le bord de l'eau. Thoirette est le diminutif de Thoire, nom d'un château qui était situé au-dessus de la rive gauche de l'Ain et qui avait été le berceau de la puissante famille de Thoire-Villars». Flottable au XIXe siècle à partir de Pont-du-Navoy (radeaux de bois, fûts de sapin pour la marine), l'Ain est navigable jusqu'au Rhône depuis la Chartreuse de Vaucluse (aujourd'hui engloutie sous le lac de Vouglans). Le commerce a des entrepôts à Thoirette et certains bateaux, qui ne font que descendre le courant, y sont construits, découvre-t-on dans l'Histoire de la navigation intérieure de la France (1829). Là, «Pendant plusieurs siècles, écrit en 1858 le Dictionnaire géographique, historique, et statistique des communes de la Franche-Comté, on traversa l'Ain à l'aide d'un bac, dit le "bac de Christouphe" (ou Courtouphle?), nom de la commune où résidait le passager. De 1808 à 1811, les communes riveraines se cotisèrent pour construire un pont à la place de ce bac. Le projet en avait été dressé par M. Cordier, d'Orgelet, ingénieur alors chargé de la direction des travaux de la route du Simplon. Différents obstacles s'opposèrent à l'exécution de ce travail. Ce n'est qu'en 1829 que fut construit un pont en fer qui s'écroula en 1843. Le département de l'Ain vient de le remplacer par un pont en fil de fer actuellement livré à la circulation». L’ouvrage actuel a été reconstruit peu après la Deuxième Guerre mondiale, entre 1947 et 1949, semblent indiquer les archives de la direction départementale des territoires de l'Ain.

Le pont sur l'Ain à Thoirette (photo: Marc Verney, juillet 2017).

SUIVRE LA ROUTE DU COMTE
A Thoirette, se situe le départ méridional de la plus jurassienne des voies: la "route du comté... On va en faire tout un fromage (lire)

On retrouve, sur l’autre rive, le département de l’Ain jusqu’à Dortan. On laisse partir, sur la droite, la route de Bourg à Nantua (D18) en direction du col de Matafelon. Cet itinéraire, qui enrobe dans son premier lacet le château des Thoire et qui rejoint Izernore, est certainement antique. Quant à la D936 vers Dortan, elle n’apparaît ni sur la carte de Cassini, ni sur la carte d’état-major du XIXe (1820-1866) qui sont publiées sur le Géoportail. Mais ces cartes ne sont pas aussi réactives que Google Maps aujourd’hui… en 1853, lit-on dans La France par cantons et par communes, il y a bien «un chemin de grande communication» de Thoirette à Dortan. Ici, l’ancienne R.N.436 longe l’Ain sur une dizaine de kilomètres. Le barrage de Coiselet (1970) a considérablement transformé les lieux, où, jadis, naviguaient les radeliers, chevauchant les bois de la montagne vers Lyon et la Méditerranée. Venus du Haut-Jura et de la Bienne, ceux-ci descendaient cette portion de la rivière, entre Condes et Thoirette. L'existence, par là, de l'ancienne frontière entre Empire germanique et royaume de France (aujourd'hui limite Jura-Ain) a longtemps fait rentrer dans le vocabulaire de ces navigateurs une bien curieuse habitude: «Sur les radeaux comtois descendant l'Ain, on ne disait pas "babord" ou "tribord" mais... "royau" ou "empi"»... écrit Roland Janod dans l'excellent article «Les radeliers de la vallée de la Bienne» (1985)… A la hauteur de Condes, dans des paysages spectaculaires, la R.N.436 historique vire subitement à droite, empruntant l’étroite vallée de la Bienne. On passe Uffel et voici Dortan qui s’annonce. «Quelques jolies maisons, une église rebâtie après le départ des Espagnols, des fontaines coulant à plein bord, des moulins, scieries, fabriques, martinets, battoirs, les vallons et les collines qui entourent le bourg forment un ensemble plein d'intérêt. Les mêmes industries que nous avons signalées à Oyonnax, enrichissent aussi Dortan», décrit joliment en 1867 l'ouvrage d'Achille Raverat, Les vallées du Bugey: excursions historiques, pittoresques et artistiques. Malheureusement, lorsque l’on rentre dans la localité par la rue du 21-Juillet-1944, c’est une autre histoire qui s’offre à notre vue… Le bourg est aujourd’hui constitué –en majorité- de logements réalisés juste après la Deuxième Guerre mondiale. Et pour cause… au moment du passage de troupes cosaques liées à l’armée allemande lors d’une action contre les maquis locaux, «après avoir été pillée, Dortan est entièrement incendiée, à l'exception du château», dit le site dortan.fr. Il y a plus d’une trentaine de morts. Le village industrieux est devenu «cité martyre», décorée par le président Vincent Auriol.

En direction de Dortan (photo: Marc Verney, juillet 2018).

On quitte Dortan avec la rue de Saint-Claude. Au niveau de «Sous le Lioux», un petit virage assez sec nous amène directement sur la limite Ain-Jura que l’on passe à nouveau. La R.N.436 (D436) continue la remontée de la vallée de la Bienne jusqu’à Saint-Claude. Cette chaussée, voit-on dans l’ouvrage De la corvée en France et en particulier dans l’ancienne Franche-Comté (1862), «a été ordonnée en 1771 on ne sait à la demande de qui. On a suivi dans son tracé les anciens chemins qu’on se bornait à élargir pour lui donner 18 à 20 pieds de largeur régulière. Elle n’a d’autre utilité que la communication de Saint-Claude à Lyon par Dortan. Elle a été tellement négligée dès son principe qu’on ne peut la regarder que comme ébauchée»… On traverse Lavancia-Epercy, un village, qui, comme Dortan, a été complètement détruit par l’armée allemande en juillet 1944. La reconstruction se déroule au début des années cinquante, comme en témoignent les photos reproduites sur le site patrimoine.bourgognefranchecomte.fr. Plus loin, en face de Jeurre, s’échappe, sur la gauche, la départementale 27, qui dessert Moirans et la région touristique des lacs. Il y avait ici, un premier pont suspendu sur la Bienne dès 1837. On note une courte rectification autour de la «gare de Jeurre», désormais évitée par la D436. Après une courbe, voici Vaux-lès-Saint-Claude. La «route de la Vallée» traverse toute l’agglomération de part en part. «Vaux n'est pas un village: c’est un jardin anglais tout parsemé d'arbres fruitiers et de chaumières, arrosé par la Bienne et offrant pour perspectives de hautes montagnes et des roches nues percées de grottes. Placé au débouché de deux vallons, sur les bords d'une rivière flottable et du grand chemin qui reliait la ville d'Antre à Dortans et à Lyon, Vaux dut être habité dès les temps les plus reculés», lit-on dans le Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de la Franche-Comté en 1854. Certains parlent même de la «riviera jurassienne» pour ces lieux, qui, dit-on, jouissent d’un micro-climat très favorable… Puis la route n°436 atteint Molinges. Aujourd’hui contourné par la «route de Lyon», le centre du village était traversé par l’ancienne R.D.8. Un décret impérial de décembre 1853 autorise «la rectification au territoire de Molinges de la route de Saint-Claude à Lyon».

A Molinges (photo: Marc Verney, juillet 2018).

R.N.470: DES COLLINES ET DES MONTS
Entre Bourgogne et monts du Jura, la route nationale 470 historique se faufile au travers des plus belles contrées de la région (lire)

Après Chassal, notre route arrive au pont de Lizon, où l’on retrouve la R.N.470 historique (D470) en provenance d’Orgelet et Lons-le-Saunier. La départementale 436 entre dans Saint-Claude par l’avenue de la Libération. La cité jurassienne doit son existence à une abbaye, fondée au Ve siècle par deux ermites, Saint Romain et Saint Lupicin. «Une bourgade se bâtit aux portes du monastère, au confluent de la Bienne et du Tacon, d’où le nom de Condat donné d’abord à la localité», écrit le Guide Bleu Franche-Comté Monts-Jura. Oyend, le quatrième abbé de l'abbaye, meurt en 510. Les guérisons opérées de son vivant se perpétuent après sa disparition et sa popularité devient telle qu’il donne, pour dix siècles, son nom à l’abbaye et à la ville: Saint-Oyend-de-Joux. Un pèlerinage s'installe durablement. «Survivante des crises du Xe siècle qui a vu disparaître bon nombre de monastères, raconte encore le site saint-claude.fr, l’abbaye est en pleine période de croissance du XIe siècle à la première moitié du XIIe siècle». Mais c’est Claude, le douzième abbé de Saint-Oyend-de-Joux, qui va marquer la région de son empreinte. Au point de lui imposer un changement de nom… Sa gloire éclipse celle de saint Oyend au XIe siècle et attire sur son tombeau des pèlerins en nombre croissant... En effet, son corps est retrouvé entier et non corrompu, bien que non embaumé... Miracle!!! Du coup les artisans de la ville réalisent de petits objets en bois à destination des visiteurs. Et voilà l'origine de la tournerie locale! L’abbaye, qui colonisait de vastes territoires dans le Haut-Jura, formait une sorte de souveraineté indépendante dans laquelle les paysans étaient «mainmortables». Ce statut de servage dans lequel les biens du paysan appartiennent à son maître ne disparaîtra qu’à la Révolution française après d’innombrables procédures judiciaires (dont l’une hélas perdue par le grand Voltaire lui-même)!

A Saint-Claude (photo: Marc Verney, juillet 2018).

RN437: LA-HAUT SUR LA MONTAGNE
La R.N.437 historique relie Belfort à Saint–Claude en traversant le Haut-Doubs et le Haut-Jura... Les beaux paysages y sont légion (lire)

SUR LE CHEMIN DES LACS
Les montagnes du Jura sont réputées pour leurs nombreux lacs, torrents et cascades. Notre balade motorisée est créée spécialement pour ce site... (lire)

Enfin, Saint-Oyend devient Saint-Claude vers le XVIe siècle. La décadence, puis la disparition de l’abbaye n’empêche pas de multiples activités industrielles de s’installer en ville et alentours. «Tabletterie, tournerie, fabrication des pipes en racine de bruyère», mais aussi, indique le Guide Bleu «de tous les objets dits "articles de Saint-Claude", en matière plastique, corne, os, ivoire, écaille» comme des peignes, des bagues, des ustensiles de cuisine… A Saint-Claude, l'usage général des toitures en lames minces de sapin (les tavaillons) occasionnait de nombreux sinistres. Celui de juin 1799 fut l'un des pires. Causé par l'imprudence d'un aubergiste, raconte Alphonse Rousset dans le Dictionnaire géographique, historique, et statistique des communes de la Franche-Comté, «trois-cents maisons à triple étage disparurent avec tout ce qu'elles renfermaient. Soixante-cinq personnes périrent dans les flammes ou sous les décombres»... Si la ville devient, au milieu du XIXe siècle, la «capitale mondiale de la pipe», il s’y développe parallèlement la taille du diamant et des pierres précieuses! Aux XXe et XXIe siècles, Saint-Claude l'industrieuse compte toujours de nombreuses d'entreprises en lien avec le secteur de la plasturgie et du jouet. Dans Saint-Claude, la R.N.436 historique traverse le Grand-Pont (1844 puis 1940), face à la cathédrale, file ensuite sur la rue Gambetta, qui devient, après le quartier Saint-Hubert, la «route de Genève» (on passait par la rue Auguste-Lançon avant 1838, explique l’ouvrage Saint-Claude, au fil des ponts et des rues). Cependant, le tracé de cette chaussée vers la grande cité helvète a connu bien des évolutions au fil du temps. La carte de Cassini (XVIIIe) publiée par l’IGN sur son Géoportail décrit une voie sortant de Saint-Claude par le nord (D69), passant vers les Moulins et escaladant la pente du Mont-Bayard par le «chemin de Très-Bayard» pour retrouver la D304 au Pontet. Puis, cette voie «de Saint-Claude à Genève» longe la combe de Tressus, passe au Haut-Crêt, traverse la Chaux-Berthod, aborde Lamoura et file vers Lajoux par la D292 actuelle. C’est , à coup sûr, l’itinéraire mentionné dans l’ouvrage De la corvée en France et en particulier dans l’ancienne Franche-Comté, et travaillé «dès 1737». Cette route, continue Simon Etienne Hyenne, «a été comprise dans la distribution générale de l’entretien en 1752; elle a encore été distribuée de nouveau en 1783 pour soulager les communautés qui étaient trop chargées. Quelque sinueuse que soit cette route, à cause des montagnes escarpées du mont Jura qu’il a fallu franchir, elle abrège le trajet pour communiquer de Saint-Claude avec le pays de Genève et Gex».

Il n'y a qu'un seul et court tunnel sur tout le trajet de la R.N.436 historique (photo: Marc Verney, juillet 2018).
Le célèbre Chapeau de Gendarme (photo: Marc Verney, juillet 2009).

Plus tard, d’autres chemins semblent s’imposer. La carte d’état-major du XIXe siècle montre une route grimpant fortement après le hameau de Montbrillant vers Septmoncel, suivant le «chemin des Moines». Le Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de la Franche-Comté de 1837 signale en effet ici une très ancienne voie, le «chemin des Grès», parce qu'elle franchissait une montagne à l'aide d'escaliers taillés dans le roc. Elle n'était, continue l'ouvrage, «praticable que par les hommes et les mulets». Mais ce chemin –amélioré- a très certainement servi ultérieurement, (pour le trafic piétonnier notamment) en remplacement ou en renfort de la chaussée passant par le Haut-Crêt et la Chaux-Berthod… En 1863, voilà ce que l’on peut lire dans l’Itinéraire général de la France: de Paris à la Méditerranée, par Adolphe Joanne: «L'ancienne route de voitures de Saint-Claude à Mijoux, par la Chaux-Berthod et la Meure (Lamoura, NDLR), est presque abandonnée aujourd'hui. Quand on veut aller en voiture de Saint-Claude à Genève, il faut gagner d'abord Morez ou Nantua... Car, écrit encore Adolphe Joanne, la route de Saint-Claude à Genève, par Septmoncel, Mijoux et la Faucille, praticable pour les voitures seulement de Saint-Claude à Septmoncel et de Mijoux à Genève», n'est ici recommandée par l’auteur qu'aux piétons! Jusqu’à Septmoncel, Joanne décrit cependant une nouvelle chaussée, évitant l’ancienne grimpette de l’actuel «chemin des Moines»: «Après le hameau de l'Essart, la route neuve s'élève, par une pente habilement ménagée, à la base de la montagne chenue appelée Sur-les-Grés que gravissait l'ancienne route, dit-il. Bientôt, on traverse un petit tunnel, long de 60 mètres environ, creusé dans une roche grisâtre. Le paysage, un des plus beaux de la chaîne du Jura français prend un grand caractère». Puis, on attaque la montée vers les Moulins, «la route décrit de nombreux lacets. Au fond de l'un de ces contours, elle passe devant une petite cascade qui tombe d'une roche bizarrement tourmentée». C'est le célèbre «Chapeau de Gendarme». Quelques minutes plus tard, voilà Montépile (joli nom!) et Septmoncel, «situés, lance encore Joanne, sur l'un des plateaux les plus nus, les plus froids et les plus tristes du Jura»... La route (mise en service en 1858) est, depuis les années trente, un haut lieu du tourisme motorisé dans le Jura: connue sous le nom des «lacets de Septmoncel» on y trouve, outre le fameux «Chapeau de Gendarme» de nombreux points de vue sur les vallées et montagnes alentours!

Passé Septmoncel, notre route traverse de vastes forêts de sapins et d'épicéas. Enfin la fraîcheur (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Septmoncel est à l’origine du fromage «bleu», qui sera d'abord nommé «gris» au XVIIIe siècle, indique septmoncel.fr. Le modeste village est aussi la patrie de Désiré Dalloz, fondateur de la maison d’édition du même nom qui publie les célèbres «codes». Elu député du Jura en 1837, Dalloz «contribua largement à l’amélioration du réseau routier jurassien pour lequel, de 1847 à 1848, il fit attribuer plus de 6 millions de francs de subventions par l’Etat», indique encore le site municipal. On lui devrait les «lacets de Septmoncel», la route des Bouchoux (D124) et le pont suspendu de Saint-Claude… Au sortir de ce village, nous n’en avons pas fini avec les difficultés! La carte d’état-major du XIXe montre en effet que la route, empruntant le chemin de l’Epine, se dirige vers le hameau de Sur-l’Etain, puis progresse difficilement à flanc de montagne en direction des lieu-dit la Couronne et le Vuez où l’on rattrape l’actuelle D436. Rappelons ces mots, glanés dans l’Itinéraire général de la France: de Paris à la Méditerranée, par Adolphe Joanne: «De Septmoncel à Mijoux, la nouvelle route de voitures n'était pas encore achevée en 1859, il fallait donc suivre l'ancienne route, fort mauvaise en certains endroits»... C’est en arrivant à Lajoux que l’on retrouve la chaussée du XVIIIe siècle et que tous les itinéraires se juxtaposent peu ou prou jusqu’à Mijoux, qui ne se trouve qu’à cinq kilomètres, après une jolie descente entre les sapins… Sur cette dernière étape, le Géoportail de l’IGN montre que la voie ancienne est matérialisée aujourd’hui par le GR9 entre la Grande-Cula et le chalet de Très-Combes. Pareil pour les lacets qui mènent à la vallée: on vire plus vite sur l’ancienne chaussée… L’histoire de Mijoux -dernière localité traversée par la R.N.436 historique- blottie au pied du col de la Faucille, est étroitement liée à la frontière qu’a souvent constituée la petite rivière Valserine qui passe en plein cœur du village. Les faits sont passionnants et font se mélanger «grande» et «petite» histoire…

Mijoux, charmant petit bourg placé au pied des plus hauts sommets jurassiens (photo: Marc Verney, juillet 2018).
Une vue de Mijoux et de la ligne de démarcation au temps de la Seconde Guerre mondiale. Cette image est reproduite sur une borne d'informations touristiques située dans le village (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Au VIIIe siècle, écrit le site mijoux.fr, l'abbaye de Saint-Oyend (Saint-Claude) reçoit de Charlemagne une vaste étendue de forêts allant jusqu'à la Valserine. Ce que confirme l'empereur Barberousse au XIIe siècle. Mais la vallée de Mijoux va encore rester longtemps en friche: c'est seulement le 22 août 1334, qu'un traité est signé entre l’abbé Jean de Roussillon de St-Oyend (Saint-Claude) et le sire de Gex, Huguard de Joinville. La vallée est commune aux deux seigneurs depuis la source de la Valserine jusqu’aux limites de la terre dépendante de l’abbaye de Chézery. Puis, y sera bâti un hôpital (refuge) qui sera doté à frais communs et égaux entre les deux personnages. En effet, la vallée voit passer des pèlerins venus de Suisse, de Savoie et du pays de Gex se rendant sur le tombeau de saint Claude. La preuve d'un trafic très ancien sur cet axe. Au milieu du XIVe siècle, le pays de Gex est cédé à la Savoie Un siècle plus tard, les défrichements sont achevés, et les paysans de Gex font grimper leurs troupeaux dans la vallée par la Faucille. En 1601, le traité de Lyon apporte au roi de France, Henri IV, le Bugey, la Bresse, le Valromey et la baronnerie de Gex. En 1612, c'est le traité d'Auxonne: le village de Mijoux côté Ain appartient à la baronnerie de Gex et est sous souveraineté française; Mijoux côté Jura appartient, lui, au comté de Bourgogne alors sous souveraineté espagnole. Un an plus tard, des bornes sont posées sur le pont de la Valserine. Enfin, en 1678, c’est le traité de Nimègue qui officialise le rattachement de la Franche-Comté au royaume de France… Il n’y a plus de frontière sur le petit pont de pierre qui franchit la Valserine! Dans son énumération des dates importantes pour la région, le site mijoux.fr donne les années 1768 et 1778 pour la construction, ici, de la route de Saint-Claude par Mijoux, d'après un mémoire des habitants de Saint-Claude pour la faire passer par le Haut-Crêt.

Cet ancien panneau indicateur du syndicat d'initiative du Haut-Jura était posé contre l'un des murs d'une habitation de Mijoux. Son emplacement original nous reste inconnu (photo: Marc Verney, juillet 2018).

Au XIXe siècle, à la chute du Premier Empire, des troupes alliées traversent le col de la Faucille, pillent et prennent le bétail des fermes alentours. Le 20 novembre 1815, après le retour à la monarchie, des «zones franches» sont créées, avec pour limite, la Valserine à Mijoux. Des postes de douanes se mettent en place… des contrebandiers commencent leurs activités illicites aussi! «Après une pétition des habitants, indique encore mijoux.fr, le village obtient sa séparation de Gex et devient commune autonome le 11 juillet 1910». Et, durant les premières années de la Seconde Guerre mondiale, Mijoux redevient frontière: la ligne de démarcation passe sur le pont de la Valserine. «Une autorisation est obligatoire pour passer, raconte le site municipal. Mijoux est à nouveau divisé en deux: le côté Jura est en zone libre, le côté Ain en zone occupée. La Kommandantur installe ses bureaux à l’hôtel du Soleil». Au XVIIIe, et début du XIXe siècle, on monte à la Faucille par un chemin prolongeant la «rue Royale». Puis les virages en épingle se succèdent sur ce qui est aujourd’hui appelé la route de la «Vieille Faucille» qui arrive au col au niveau de l’accès aux remontées mécaniques de l’actuelle station de sports d’hiver. Aujourd’hui, on suit la rue Dame-Pernette (D936) qui nous emmène à l’extrémité de la R.N.436, au carrefour avec la «route blanche», la grande chaussée Paris-Genève (R.N.5 historique, D1005 auj.), dont les travaux d’accès au col de la Faucille se sont étalés du Premier au Second Empire.

Marc Verney, Sur ma route, février 2020

Au col de la Faucille, on trouvait cette ancienne indication touristique évoquant Mijoux... tout en bas dans la vallée (photo: Marc Verney, août 2005).

R.N.5: LA ROUTE BLANCHE...
La N5 Paris-Genève-St-Gingolph a quasiment disparu à la suite du vaste déclassement des routes nationales en 2006, une bonne raison pour faire un tour par le Jura... (lire)

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