Panneau Michelin à Chabeuil (photo: MV, octobre 2018).
A la sortie de Vienne (photo: MV, août 2013).

A Romans, la route travarse l'Isère (photo: MV, août 2013).

AMI LECTEUR: les photos, textes et dessins de ce site sont soumis au droit d'auteur. Pour toute autre utilisation, contacter l'auteur. Merci de votre compréhension...

Sources et documents: Atlas des grandes routes de France, Michelin (1959); Atlas routier et touristique France, Michelin (2014); carte Environs de Lyon n°91, Michelin (1951); carte Lyon-Avignon n°93, Michelin (1942); carte Etat des routes n°99ER, Michelin (1932); Essai sur la statistique, l'histoire et les antiquités du département de la Drôme, M. Delacroix, Montal (1817); Géographie historique, physique, politique, industrielle, commerciale, statistique et pittoresque du département de l'Isère, V. Brunet, impr. de Prudhomme (1857); Guide du Routard Provence, Hachette (2008); Guide Vert Vallée du Rhône, Michelin (2000); Histoire de la ville de Crest, André Mailhet, impr. de A. Ducros (1900); Histoire de la ville de Malaucène et de son territoire, T. 2, par Ferdinand et Alfred Saurel, éditeurs J. Roumanille (Avignon), M. Lebon (Marseille), 1882-1883; «L’agglomération antique de Turedonnum», Nicolas Drouvot, dans la Revue archéologique de Narbonnaise (2005); «La production maraîchère et fruitière et le marché de Cavaillon», Régine Pélissier, dans Méditerranée (1964); L'arrondissement de Nyons, A. Lacroix, impr. Jules Céas et Fils (1888); Mémoire statistique sur le département de Vaucluse, Maxime Pazzis, impr. D. G. Quenin (1808); Notice historique sur Hauterives, A. Lacroix, impr. de Marc Aurel (1854); Notice historique sur la ville de Crest, par l'abbé Vincent, impr. de E. Marc-Aurel (1859); Procès-verbal des délibérations du Conseil général du département de l'Isère, éd. Conseil général de l'Isère (1849); Rapport du préfet, conseil général de l'Isère (avril 1882), F. Allier Père & Fils impr. (1882); Romans et le Bourg-de-Péage avant 1790, André Lacroix (impr. de Jules Céas et fils, 1897); Statistique de la France, ministère de l'Agriculture, Imprimerie impériale (1855); amisduvieilalixan.fr; dromedescollines.fr; mairie-chabeuil.com; mairie-crest.fr; nyons.com; perneslesfontaines.fr; structurae.info; villagemalaucene.free.fr; Wikipédia, Wikisara. Remerciements: le Géoportail de l’IGN.

Ancienne publicité Total à la sortie de Bourg-de-Péage (photo: MV, août 2013).

Villes et villages traversés par la N538 (1959):
Vienne (N7)
Bérardier
La Rozière
Cour
Maison-Berthet (Revel)
Beaurepaire-d'Isère (N519)
Lens-Lestang
Hauterives
Le Four-à-Chaux
Le Cabaret-Neuf
Marges
Peyrins
Mors-St-Eusèbe
Romans-sur-Isère (N92)
Bourg-de-Péage
Alixan
Montelier
Chabeuil
La Paillette
Crest (N93)
Lambres
Saou
Bourdeaux
Dieulefit
La Roche-St-Secret
Rousset
Nyons (N94)
Mirabel
Vaison-la-Romaine
Malaucène
Serres
Carpentras (N542)
Pernes-les-Fontaines
Saint-Antoine
L'isle-sur-la-Sorgue (N100)
Velorgues
Cavaillon
Orgon (N7)
Sénas
Salon-de-Provence (N113)

D'autres ressources autour de la nationale 538 historique: La page Wikisara consacrée à cette nationale française (lire).
La page Wikipédia de la RN538 historique (lire).

Les environs du village de Saou sont d'une grande beauté. La pierre des maisons se confond avec la roche des montagnes sous un soleil de plomb (photo: MV, août 2013).
Plaques Michelin à Bourdeaux (photo: MV, août 2013).

A VOIR, A FAIRE
Vienne: les musées de la cité, comme le musée des Beaux-Arts et d'Archéologie, le musée archéologique Saint-Pierre, le musée du cloître de Saint-André-le-Bas et le musée de la Draperie. La ville conserve de nombreux restes de la période gallo-romaine: le Temple d'Auguste et de Livie, le jardin archéologique de Cybèle, le théâtre antique (Ier siècle), la pyramide (unique vestige du cirque romain). On doit aussi aller visiter le site archéologique de Saint-Romain-en-Gal. Sur les berges du Rhône, un jardin public montre les vestiges d'une voie romaine. Autres lieux: la cathédrale Saint-Maurice (XIIe-XVIe), maisons et cours Renaissance dans la rue des Orfèvres.
Beaurepaire: quelques maisons pittoresques au centre-ville, le château de Barrin, situé sur les hauteurs de la ville, l'église Sant-Michel en partie du XVe siècle.
Hauterives: le Palais idéal du facteur Ferdinand Cheval.
Romans-sur-Isère: la collégiale Saint-Barnard, la côte Jacquemart (anciennes demeures des XIIIe et XIVe siècles), la tour Jacquemart, l’hôtel Thomé, à la façade Renaissance, la pittoresque rue des Clercs, et (évidemment) le musée international de la Chaussure…
Crest: le donjon de 52 m (le plus haut de France), vieilles demeures.
Saou: un village pittoresque; magnifiques randonnées à organiser dans la forêt, toute proche (D136).
Bourdeaux: un village charmant avec les ruines de deux châteaux dominant les maisons. Une halte rafraîchissante.
Dieulefit: le centre historique et, non loin, le village médiéval fortifié du Poët-Laval, dominé par son imposant donjon.
Nyons: le pont roman de Nyons, inauguré en 1409 par l'évêque de Vaison, les vieux moulins des XVIIIe et XIXe siècles et la savonnerie, datant des années 1730. Un musée de l'Olivier présente une collection de l'outillage traditionnel nécessaire à la culture des oliveraies. A voir également, la tour Randonne, appelée aussi la chapelle de Bon-Secours.
Vaison-la-Romaine: on ne manquera pas la visite de la ville romaine et la traversée du pont sur l’Ouvèze. Belle promenade dans les rues de la ville médiévale.
Malaucène: les paysages imposants du mont Ventoux, à l’est, et l’original massif des Dentelles de Montmirail à l’ouest.
Carpentras: on recommande une promenade dans les rues labyrinthiques du centre ancien, fermé par la porte d’Orange (XIVe siècle). On peut aussi visiter la synagogue (la cité fut un refuge pour les juifs, chassés de France par Philippe le Bel), l’Hôtel-Dieu du XVIIIe, la cathédrale Saint-Siffrein.
Pernes-les-Fontaines: la tour Ferrande et une visite du bourg et de ses 40 fontaines…
L’Isle-sur-la-Sorgue: on doit faire la jolie promenade le long des quais afin de découvrir les anciennes roues à aube qui rythmaient l’activité économique de la cité. On peut aller voir la maison de René Char. A quelques kilomètres, voici des merveilles: la Fontaine-de-Vaucluse, le village de Gordes, l’abbaye de Sénanque…
Cavaillon: au pied des montagnes du Lubéron (un but en soi), on y visite la belle synagogue, classée monument historique en 1924 (elle illustre bien le mode de vie des populations juives dans l’enclave papale), la cathédrale romane Saint-Véran… On peut monter à la colline Saint-Jacques (vue).

Salon-de-Provence: le château de l'Empéri, qui domine les anciens quartiers est l'un des plus grand châteaux médiévaux de Provence (on y trouve un musée d’histoire militaire). Par ailleurs, Nostradamus a vécu et est mort à Salon. Egalement dans la cité, le musée Grévin de la Provence.
Jolie plaque de cocher à Bourdeaux (photo: MV, août 2013).
Borne d'indications routière en pierre aux alentours de Dieulefit. On évoque ici le chemin de grande communication n°12 (photo: MV, août 2013).






Belles routes de France...
[ROUTE D'ETE]: R.N.538, TOUT UN ROMANS...
Après la «route buissonnière» et Lyon, le site Sur ma route poursuit son chemin vers le Sud en empruntant les voies de traverse… Inutile de se presser quand on est en vacances, non? Voici donc la deuxième partie de notre trajet tout en courbes en direction du soleil: la R.N.538 historique. Entre 1933 et 1952, cette route relie Vienne (Isère) à Marseille (Bouches-du-Rhône). C’est un très bel itinéraire touristique -d’un peu plus de 200 kilomètres- que j’ai suivi en août 2013 jusqu'à Cavaillon où l’on apprend lentement à déguster les saveurs du Sud… En route pour le pays des cigales!

La route nationale 538 historique entre dans Saou (photo: MV, août 2013). En cliquant sur l'image vous accédez à la R.N.7 historique.


R.N.7: L'APPROCHE DE LA GRANDE BLEUE
Troisième partie de notre balade vers l'azur: la vallée du Rhône. Après Lyon, finie la grisaille du Nord. Balayé par le capricieux mistral, le sillon rhodanien nous précipite au pays des cigales (lire)

On quitte Vienne par la montée Saint-Marcel, une chaussée qui existe déjà sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par le Géoportail de l’IGN. Cependant, celle-ci s’embranche rapidement sur le chemin des Maladières par celui de l’Octroi. On passe successivement les villages de Bérardier, la Rosière (hameau de la commune d’Estrablin); on passe la Suze pour se diriger vers Cour-et-Buis. Ici, les chaussées ont été fortement améliorées au milieu du XIXe siècle, lit-on dans Wikipédia. En 1849, le rapport du Conseil général de l'Isère indique d’ailleurs un «état satisfaisant» pour ce qui est alors la D14, réalisée après 1834. Enfin, Wikipédia nous indique encore que ces lieux étaient «la principale source d'approvisionnement en eau de la ville de Vienne gallo-romaine. En effet, quatre des onze aqueducs apportant l'eau à Vienne» venaient de ce territoire. Plus loin, le village de Cour-et-Buis est issu de la fusion de deux communes, juste après la Révolution française. Dans le rapport d’avril 1882 du département de l'Isère, on peut lire que «le conseil municipal de Cour-et-Buis a demandé en date du 10 juillet 1881 l'élargissement de la route départementale n°14 dans la traverse de Cour». La chaussée devant avoir «une largeur de 10m». Après avoir coupé la ligne à grande vitesse Lyon-Méditerranée, la chaussée s’approche de Primarette et de Revel-Tourdan.

Peu après Vienne (photo: Marc Verney, août 2013).
Ancienne plaque à La Rozière (photo: Marc Verney, août 2013).

«L’agglomération antique de Turedonnum», un article de Nicolas Drouvot publié par la Revue archéologique de Narbonnaise nous éclaire sur le passé gallo-romain de la région. On y lit que, sur la Table de Peutinger, Turedonnum «apparaît comme première étape de la voie de Vienne à Milan par Grenoble». N538 historique et voie romaine se confondent donc en partie jusqu’ici. On entre maintenant dans Beaurepaire-d’Isère. C’est un «joli bourg, nous dit l'ouvrage Géographie historique, physique, politique, industrielle, commerciale, statistique et pittoresque du département de l'Isère, à l'embranchement de plusieurs routes, ses rues sont droites et les maisons bien bâties. Les alentours sont couverts de belles prairies plantées de saules et de peupliers. Ce bourg, éloigné des grandes villes est un petit centre commercial». Autre particularité: l’électricité. «Dès 1883, écrit Wikipédia, un artisan-mécanicien, Louis-Michel Villaz, utilisa sa machine à vapeur de battage, une dynamo et des lampes à arc pour éclairer quelques rues de la ville»… Cinq kilomètres au sud, la route pénètre dans Lens-Lestang (Drôme). Petite curiosité: la route, avant les grandes courbes qui la font monter en direction d’Hauterives, longe la «maison du Marin», décorée dans le style art brut avec des objets chinés à la brocante... Ca surprend! Un fait intéressant: ici, la chaussée n’est pas mentionnée sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par le Géoportail de l’IGN. On retrouve sa trace quelques kilomètres plus loin, dans la forêt de Mantaille. C’est une des quatorze lacunes mentionnées par le Courrier de la Drôme et de l’Ardèche du 26 mars 1841 sur cet axe, numéroté D6 dans la Drôme. Encore six kilomètres et voilà Hauterives. «Placé entre deux coteaux élevés qui se continuent de Roybon à Saint-Vallier, nous explique la Notice historique sur Hauterives, le bourg assis dans la belle vallée de la Galaure, dut son nom à sa position... (...) Ce modeste village était construit jadis dans l'enceinte d'un château fort, sur le versant d'une côte sablonneuse qu'un éboulement ancien semble avoir détaché de la rive septentrionale de la Galaure». Aujourd’hui, la cité est connue pour le Palais idéal du Facteur Cheval, vaste et étonnante structure de style naïf réalisée de 1879 à 1912 à l’aide des pierres glanées sur le trajet de ses tournées. D'après la Statistique de la France de 1855, un pont suspendu sur la Galaure est construit en 1843. Il est constitué d'une seule travée de 30m et d'une largeur de 4,5m. On suit la route de Romans.

Ancien tracé de la R.N.538 vers Marcollin (photo: Marc Verney, août 2013).

Jusqu’à Romans-sur-Isère on constate encore de nombreuses lacunes apparentes sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par le Géoportail de l’IGN. Et ce, notamment autour du village de Montchenu, où les paysages se font néanmoins charmants. C’est la Drôme des collines. Autour de Margès, la R.N.538 historique prend le nom de route des Dauphins et traverse l’Herbasse peu avant le bourg. Il reste douze kilomètres à parcourir avant d’entrer dans la cité de Romans-sur-Isère. Une fois de plus, voilà une ville-carrefour, regroupée autour de son pont à l'histoire centenaire. Dans l'ouvrage Romans et le Bourg-de-Péage avant 1790, on lit que ce sont des bacs qui traversent l'Isère jusqu'en 1033. Le premier pont en bois daterait de cette époque. Il aurait été construit par les religieux de la cité. De terribles inondations (le «déluge de Grenoble»!!) emportent l'ouvrage au début du XIIIe siècle. Construit par la suite partiellement en pierre, il est cependant régulièrement détruit par les eaux torrentielles. Du coup, le roi de France offre 10 000 livres pour sa reconstruction; les travaux débutent à la moitié du XVIIIe siècle pour un montant total de 53 895 livres, dont la moitié à la charge de Romans. Il résiste à une forte montée des eaux en 1744 mais saute sous les explosifs français devant l'avancée des Autrichiens en 1814. On le répare en 1818; un projet d'aménagement des accès est mené de 1855 à 1860: les maisons gênantes sont détruites, des quais protecteurs sont bâtis, on pose des trottoirs... La présence -longtemps!- d'un péage sur l'ouvrage conduit à la naissance en face de Romans, de Bourg-de-Péage. Là, la D538 prend –en ligne droite- la direction d’Alixan, située 5 km au sud. Sur la carte d’état-major du XIXe siècle, on parle ici de la «route de Montélimar à Beaurepaire».

R.N.92: AUX CONTOURS DES MONTS
Entre Genève et Valence, cette belle route au parcours atypique visite monts et merveilles avant d'atterrir au pays des cigales... Une course au soleil qui va vous plaire (lire)

Alixan est un village circulaire, qui s’enroule en trois anneaux autour d'un piton central en molasse, où se trouvait le château, peu à peu détruit par les habitants qui réutilisaient ses pierres pour leurs propres maisons (amisduvieilalixan.fr). Plus loin, la voie croise le canal de la Bourne, un ouvrage de la fin du XIXe siècle destiné à alimenter en eau les champs de la plaine de Valence. Entre Alixan et Crest, à voir la carte d’état-major 1820-1866 publiée sur le site de l’IGN, il ne semble pas y avoir de chaussée avant la seconde moitié du XIXe siècle. Après Montélier, le bourg de Chabeuil a une histoire intéressante: «Pendant la guerre contre l'Espagne, raconte le site mairie-chabeuil.com, Louis XIV offrit la ville à Honoré II Grimaldi de Monaco, qui resta son fief jusqu'à la Révolution de 1789»… Une déviation moderne contourne désormais la ville. Il y a à peu près une vingtaine de kilomètres jusqu’à Crest, où la R.N.538 historique emprunte quelques hectomètres de la R.N.93 (D93) pour atteindre le centre-ville de la ville au donjon (le plus haut de France avec 52 m). «La fondation officielle de Crest, nous révèle le site mairie-crest.fr, est attribuée à la famille des Arnaud, à qui la ville doit son nom originel de Crista Arnaldorum, ou Crête des Arnaud». Le rattachement au  royaume de France par Charles VI intervient en 1426. La cité, nous indique encore le site de la mairie, «connaît son apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles, avec le développement du commerce, de l’industrie des draperies, du coton et de la soie». «Au Moyen Age, écrit la Notice historique sur la ville de Crest, un pont assurait les communications entre les deux rives de la Drôme. Primitivement construit en bois, il reposait sur de larges massifs de maçonnerie régulièrement espacés; mais la violence des eaux lui fit substituer un nouveau pont»... En 2001, c’est encore un nouveau pont… en bois qui est inauguré!!

Entre Chabeuil et Crest (photo: MV, août 2013).

La route n°538, au-delà de Crest, est réellement charmante. Nous voici en route, au travers de la Drôme provençale, en direction de Saou, Dieulefit, Bourdeaux. A Lambres, notre R.N.538 quitte le vieux chemin de Montélimar à Beaurepaire qui suit la départementale 26. Vers Saou, sur la carte d’état-major du XIXe siècle (1820-1866), les chemins ne sont pas encore tracés. On retrouve une route peu avant Saou. Les paysages deviennent grandioses. Jusqu’à Bourdeaux, la carte du XIXe siècle montre une chaussée en travaux qui suit le cours du Roubion. En 1817, dans l'Essai sur la statistique, l'histoire et les antiquités du Département de la Drôme, on lit en effet que l'on projette d'ouvrir une route par «Crest, Saou, Bourdeaux, Dieu-le-fit»... «Le protestantisme a profondément marqué le pays de Bourdeaux, raconte Wikipédia, et l'on trouve de nombreux petits cimetières familiaux. Au moment de la révocation de l'édit de Nantes, la répression est très sévère et en 1683 la bataille de Bourelles fait 120 morts. Au XIXe siècle, les habitants de la région travaillent essentiellement la laine et la soie». Il faut maintenant monter au col de Boutière. Là, entre ce lieu-dit et le col de Ventebrun, on peut remarquer que la chaussée a été quelque peu rectifiée; par ailleurs, le tracé est toujours indiqué en travaux sur la carte d’état-major du XIXe publiée par l’IGN sur le Géoportail… Voilà Dieulefit. En lisant la page Wikipédia de ce joli bourg, on apprend que de nombreux réfugiés y trouvèrent un havre de sécurité entre 1940 et 1944. Parmi eux, des écrivains, des intellectuels mais aussi de simples citoyens pourchassés par la barbarie nazie. Après Dieulefit, il faut maintenant suivre la direction de Nyons.

A 8 km au sud de Crest (photo: Marc Verney, août 2013).
A l'approche du village de Bourdeaux (photo: MV, août 2013).

A Nyons, la route historique traverse la rivière Aygues sur un pont roman de 1409. Là, explique le site nyons.com, «l'influence romaine se traduit par la multiplication d'établissements agricoles dont on retrouve les traces dans les champs. Le petit bourg de Noiomagus est la capitale de la tribu voconce des Noiomagenses. Il se trouve sur la voie romaine reliant Vaison à Luc». Après les invasions germaniques du Ve siècle puis sarrazines du VIIIe au Xe, un système féodal s’installe dans la région. Nyons fait alors partie du royaume de Bourgogne rattaché à l'Empire germanique. La cité se débarrasse de ses vieux remparts au XIXe siècle alors que s’ouvrent –dans la région- des routes carrossables et que l'Aygues est enfin endiguée. Il faut ensuite parcourir 7 km pour parvenir à Mirabel-aux-Baronnies par ce qui est au XIXe siècle la «route départementale n°4». «Sur un plateau sablonneux et couvert d'oliviers, lit-on dans l'ouvrage L'arrondissement de Nyons (1888), le bourg de Mirabel domine au nord le frais vallon de la Gaude et la plaine de l'Aygues. A l'est, une chaîne de montagnes boisées et à l'ouest, un coteau peu fertile resserrent seuls son immense horizon». On quitte cette cité en direction du sud par l’avenue de la Résistance. Il y a neuf kilomètres jusqu’à Vaison-la-Romaine; on entre dès lors dans le Vaucluse (la route porte maintenant le numéro D938). Le passé de Vaison est prestigieux. Ancienne capitale des Voconces, la cité connaît sa période de splendeur au IIe siècle, signale le site vaison-la-romaine.com. «Elle couvre alors 70 à 75 hectares. Elle est l’une des villes les plus riches de la Narbonnaise. Après la chute de l’empire romain, Vaison devient un centre religieux relativement important», puisque s'y tiennent deux conciles, en 442 et 529. Ouvrage particulièrement notable, le pont sur l’Ouvèze, longtemps seul lien entre les deux rives, construit au Ier siècle, sert encore au passage des touristes et des véhicules. Il faut désormais suivre la route de Malaucène. A l’ouest, voici le massif des dentelles de Montmirail; au loin, en face de nous, se découpe la massive silhouette du mont Ventoux (1911 m), le «géant de la Provence».

Plaque de cocher à Mirabel-les-Baronnies (photo: MV, août 2013).
Le beau pont romain de Vaison-la-Romaine (photo: MV, août 2013).
Vue sur le mont Ventoux depuis la R.N.538 historique (photo: Marc Verney, août 2013).

Au milieu de ces beautés naturelles, la route s’approche de Malaucène par un chemin amélioré peu avant la Révolution (Mémoire statistique sur le département de Vaucluse, 1808). Anciennement possession des comtes de Toulouse, la cité passe sous le contrôle de la papauté en Avignon en 1274. L’histoire de la ville de Malaucène nous indique que les chemins locaux «peu ou prou réparés et entretenus», servaient déjà à l'époque romaine. «Depuis le XIIIe siècle cependant, ces voies papales exposées aux empiétements des voisins, n'en étaient ni plus larges ni mieux entretenues. En 1761, les arbres envahissaient les chaussées de façon que les gens à cheval ne pouvaient y passer sans danger». Alors que Malaucène revient à la République en 1791, de gros chantiers de rectification sont menés sur le chemin de Carpentras à la Restauration. On remarque en effet une vieille route passant par le Barroux sur la carte IGN (D78). La chaussée, désormais en plaine, file en quasi ligne droite vers Carpentras, que l’on atteint par l’avenue Saint-Roch. Capitale d’une tribu gauloise, les Mémimiens, la cité, nous dit le site carpentras.fr, «avait déjà le rôle d’une importante place de marché à rayonnement régional. La conquête romaine du IIe siècle avant JC et la création d’importantes voies d’échanges commerciaux renforcent la prospérité agricole et marchande de la cité, qui reçoit d’Auguste, empereur romain, le droit latin de colonia». La région –appelée Comtat Venaissin- passe sous le contrôle des papes du XIVe au XVIIIe siècle. Plus tard, le canal de Carpentras, creusé au milieu du XIXe siècle permettra de développer l’agriculture et d’écouler les fruits et légumes du Comtat dans toute l’Europe grâce au chemin de fer. Notre route suit désormais le chemin de Pernes-les-Fontaines. Ancienne capitale du Comtat Venaissin, la petite cité est fière de ses quarante fontaines qui glougloutent dans ses rues et de ses 22 monuments classés... L’Isle-sur-la-Sorgue est située à 11 km au sud. «Fief des comtes de Provence, puis des comtes de Toulouse, enfin du Saint-Siège, la cité est fortifiée par les papes et devient le refuge des cités voisines. Elle fut ainsi épargnée par les guerres de religion» (Wikipédia). On sort de la ville par l’avenue de l’Egalité.

La petite cité de l'Isle-sur-la-Sorgue est une étape obligée du voyage (photo: Marc Verney, août 2013).

La fin du voyage sur la nationale 538 historique s’approche rapidement car voici Cavaillon, située une dizaine de kilomètres au sud, sur les bords de la Durance. La ville a une grande importance sous la domination romaine. Y passait la voie Domitienne, reliant l’Italie à l’Espagne. Surnommée «capitale du melon», on y trouve d’importantes activités maraîchères. Dans les années 60, 25% de la production locale partait vers Paris, suscitant une colossale circulation automobile sur la R.N.7, toute proche («La production maraîchère et fruitière et le marché de Cavaillon» par Régine Pélissier). Si aujourd’hui, on va traverser la Durance sur un large pont moderne tout neuf, c’est un bac qui fut utilisé jusqu’en 1837… date à laquelle nous indique la base Structurae, un ouvrage suspendu est réalisé. Cependant, tout ne se passe pas comme imaginé: en janvier 1850, «une violente tempête détruit le pont en entier», en novembre 1886, «l'ouvrage est affaibli par une série de crues qui, finalement, emportent une pile et causant la destruction entière du pont»... qui est à chaque fois rebâti. En 1931, enfin, le pont ancien est démoli «après l'inauguration du nouveau pont suspendu à une seule travée de 306 mètres qui le remplace»... jusqu'à la guerre! Après un court trajet sur la nationale 7, la nationale 538 historique prend le chemin de Salon-de-Provence à Sénas. A l'origine, apprend-on sur Wikipédia, la R.N.538 reliait Vienne à Marseille. Mais en 1952, la section allant de Salon-de-Provence à la cité phocéenne reçoit le n°113. Notre voyage s'achève donc ici... Nous aurons parcouru 268 kilomètres depuis Vienne, en Isère.

On avance vers Cavaillon (photo: MV, août 2013).
L'arrivée à Cavaillon (photo: MV, août 2013).

Marc Verney, Sur ma route, juin 2015

Continuer vers le Sud par la route nationale 7 (lire)
Revenir à la page principale du site (lire)