Cette borne de limites départementales entre Yonne et Côte d'Or date très certainement du XIXe siècle (photo: MV, janvier 2006).
Ressources documentaires consultées: En route! La France par monts et par vaux (Florence Trystram, Gallimard, 1996); Quid 2000, Wikipédia, Wikisara.
Cette ancienne plaque à Lélex (Ain) montre bien l'inscription: "chemin de grande communication" dont la première mention apparait sous Louis-Philippe (photo: MV, juillet 2008).
Plaque de la route "impériale" n°5 à Saint-Laurent-en-Grandvaux (Jura). Ces très belles plaques d'émail tendent à devenir fort rares (photo: MV, avril 2006).
Ces anciennes signalisations Michelin situées dans le nord de la Côte d'Or portent la mention IC, pour "intérêt commun" (photo: MV, janvier 2006).
Ancienne borne kilométrique de la N5 (photo: MV, nov. 2007).
Panneau Michelin de la N5 à Melun (photo: MV, octobre 2005).
Panneaux modernes de la N5 à Genlis, en Côte d'Or (photo: MV, avril 2006).
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Pour ne pas tomber dans le panneau! Voici quelques mots sur la signalisation routière que le visiteur risque de rencontrer au fil de sa visite sur ce site (lire)

La documentation écrite
Ces ouvrages et revues apportent un complément d'information sur le sujet traité... (lire)

La civilisation du macadam
Détestée ou adorée, l'auto, la bagnole, la "caisse", a totalement révolutionné notre mode de vie. Souvent jusqu'à l'absurde! (lire)

Bleue... comme la route
Il n'y a pas que Michelin dans la vie... des routes françaises! (lire)
Alors, en 2009, c'est quoi une nationale? Ces voies importantes, financées et gérées par l'Etat (les Directions interdépartementales des routes) sont en nette régression: il ne reste aujourd'hui qu'environ 9000 km d'itinéraires nationaux. Contre 26 430 km en 2003. Et ce sont de plus en plus des routes rapides à quatre voies possédant toutes les caractéristiques d'une autoroute (mis à part la vitesse, limitée à 110 km/h).



surma-route.net
"AU FAIT, C ’EST QUOI UNE ROUTE NATIONALE?"
Le site Sur ma route, vous avez pu le constater, s’intéresse aux anciennes grandes routes nationales françaises, et en particulier à la route nationale 5, la "route blanche" Paris-Genève-St-Gingolph dont nous avons suivi l'ensemble du tracé 1959. Les plus prestigieuses d’entre-elles (comme la N7) ont été totalement ou partiellement déclassées entre 2004 et 2006 mais l’histoire des routes en France montre qu’un itinéraire a souvent évolué au fil des ans entre gestion étatique et locale. Sans refaire l’histoire des transports (ce qui n'est pas notre but), voici quelques généralités historiques sur les itinéraires nationaux et leur gestation.

La nationale 5 historique sur les bords du lac Léman (photo: MV, avril 2006). En cliquant sur l'image, vous pousuivez dans la partie documentation du site.

La Gaule romaine compte 4000 km de voies. C’est le premier grand réseau de communication organisé qui parcourt des régions appelées à devenir la France. La largeur de ces routes pavées ou empierrées est de 2,48 m en ligne droite, 4,96 m dans les courbes. A l’époque, la capitale est Lugdunum (Lyon), Marcus Agrippa, gendre de l’empereur Auguste (63 av. JC-14 ap. JC) lance en 20, 19 av. JC la réalisation des quatre premières grandes voies: Lyon-Italie par Fréjus, Lyon-Espagne par Narbonne, Lyon-Toulouse et Lyon-nord de la Gaule par Langres.

Le travail de réalisation est très soigné: ce sont des arpenteurs qui établissent le tracé avec des niveaux à eau et des mires; ils sont suivis par des bûcherons qui déblaient le terrain. Le terrain vierge est creusé jusqu’à atteindre la roche. On comble le sillon avec un mélange de sable et de cailloux censé stabiliser la terre. Puis, les pavés sont posés: des pierres plates s’emboîtant les unes dans les autres. Le tracé général est d’abord une question militaire: il s’avance droit en suivant le flanc des collines pour ainsi éviter le risque des embuscades. Jalonnées par de nombreuses bornes milliaires, les voies romaines étaient bordées d’auberges, dévolues au confort des voyageurs et des équipages. La couleur des murs de ces endroits était le rouge. Aujourd’hui, au bord de nos routes on peut être sûr que tous les lieux nommés "Maison rouge" ont pour origine un relais romain.

A gauche, voie romaine entre Sens et Tonnerre; à droite, borne milliaire à côté d'Alise-Ste-Reine (Photos: MV, déc. 2005 et janv. 2006).

De nombreuses années se passent sans qu’il soit vraiment apporté une amélioration au réseau romain, qui se détériore irrémédiablement. Les voies disparaissent, se fondent dans la végétation. C’est sous le règne de Philippe-Auguste, que l’on retrouve des décisions étatiques (lois, règlements) à propos de la voirie publique. L’homme fit notamment débuter le pavement des rues de Paris en 1184. Les pierres utilisées ne sont plus les larges dalles disposées sur les voies romaines, mais des pierres plus petites et calibrées pour une pose plus facile. Ce sont d’abord les routes de sortie des villes et les chaussées aux alentours des ponts qui sont ainsi revêtues.

Première trace d’une organisation nationale en 1400: les fermiers autour de la capitale sont tenus de paver les chemins sortant de la capitale et sont responsables de l’inspection des routes en province. Vers l’an 1550, il y a environ 25 000 km de voies carrossables en France. La technique routière reste très rudimentaire: la route n’est qu’empierrée et ce sont les accotements en terre qui supportent (par beau temps) le gros du trafic. Tous les passages obligés (ponts, gués et cols) sous soumis à péage, qui sont censés financer l’ouvrage et la protection du trafic. Le danger est cependant partout: les brigands règnent en maîtres et détroussent les voyageurs.

Mais c’est à cette époque
que s’établit le maillage du territoire français que nous connaissons encore aujourd’hui: une demi journée de marche (10 km) entre deux villages, deux jours à pied (25-30 km) entre deux bourgs, deux journées de cheval (100 km) entre deux villes importantes. Louis XI rédige un édit en 1499 qui enjoint aux trésoriers de France de parcourir le pays et de dresser un état des lieux des voies de communication. A la même époque, le pavement des voies s’étend à la campagne. Henri IV est le premier roi de France à vouloir développer une politique des routes. Avec l’aide de Sully, il crée le premier budget des Ponts et Chaussées et publie de nombreux actes ayant trait à la confection des voies de communication. C’est de cette époque que l’habitude est prise de planter des arbres le long des chaussées les plus importantes. On réglemente également la corvée, impopulaire, qui touche les riverains des routes.

Louis XIV et Colbert vont définitivement ancrer les politiques routières au coeur de l’Etat. Une circulaire, en 1680, décrit avec précision la logique développée alors: "Il faut considérer la grande route des provinces à Paris comme la principale et la plus importante, à cause de la communication continuelle que toutes les provinces ont avec la capitale du royaume, et que c’est presque le centre de toute la consommation". Ce texte est quasiment l’acte de naissance des routes nationales et de la "toile d’araignée" qui s’impose encore à l’Hexagone du XXIe siècle... Par arrêté du Conseil d’Etat, l’administration des Ponts et Chaussées naît en 1716. Le XVIIIe siècle allait enfin voir évoluer la technique de confection des routes. Sous le règne de Louis XV, l’ingénieur Pierre Tresaguet, qui préconise la recherche de la ligne droite dans la desserte des capitales régionales, invente le "chemin ferré", qui consiste à donner à la route des assises très solides (moellons posés en hérisson) sur lesquels on dépose une première couche de pierraille supportant une couche d’usure sablonneuse. Le réseau, de 32 000 km, est divisé en trois catégories, les routes de postes, les routes de commerce et les itinéraires militaires qui contournent les cités.

En 1776, un premier classement organise les routes en quatre catégories, suivant leur largeur entre les fossés: 42, 36, 30 et 24 pieds. Quelque peu malmené par la Révolution française, le réseau routier français est repris en main par Napoléon Bonaparte, un homme féru de cartographie. Et le souci principal du nouvel empereur est d’ordre militaire. Il fait refaire en priorité les axes qui conduisent aux frontières afin d’augmenter la vitesse de déplacements de ses armées. Les chantiers les plus importants ouverts sous l’Empire sont les chaussées menant à l’Italie (Simplon, Mont-Cenis, Mont-Genèvre, Nice-Gènes) et à l’Espagne (Somport). C’est dans ce cadre là que sera d’ailleurs totalement remanié l’accès au col de la Faucille dans le Jura, sur la "route blanche" (lire). Le décret du 16 décembre 1811 ordonne les routes en trois groupes: la route impériale de première classe (14 voies partant de Paris -il y a des tronçons communs), la route de deuxième classe (13 voies qui relient Paris à des cités de moindre importance) et 202 routes de troisième classe (cette 3e classe étant à la charge partagée des autorités locales et nationales).

A gauche et à droite, anciennes bornes indicatrices sur le trajet de la nationale 5 historique, à Saint-Florentin et vers Cerisiers (Photos: MV, oct. 2005 et janv. 2006).

Après Napoléon, la Restauration continuera de développer le réseau routier national. Sous Louis-Philippe, les routes locales sont réorganisées: certaines deviennent des chemins d’intérêt commun (IC) alors que les plus importantes prennent la dénomination de chemins de grande communication (GC). C’est dans ce contexte qu’intervient John McAdam (1756-1836). Son procédé, ultra simple, permet d’augmenter la vitesse tout en facilitant la construction et la maintenance des routes: en fait, c’est le sol naturel qui supporte le poids de la route. Bien asséché, il peut résister à tous les trafics Il suffit donc de déposer sur un sol bombé trois couches de 5 cm de pierres de calibre décroissant pour obtenir une surface de roulement solide et confortable.

L’arrivée de l’automobile (fin XIXe siècle) va bouleverser l’équilibre d’un réseau français que beaucoup considèrent comme l’un des meilleurs au monde: il y a quasiment un kilomètre de route par km2 de territoire! Mais la poussière va s’avérer un ennemi redoutable pour l’usager motorisé qui parcourt les campagnes à des vitesses jamais atteintes. Le goudronnage des axes (d’abord dans le Sud-Est puis en région parisienne) se généralise, tout comme la signalisation (lire). En 1908, le premier congrès international de la route adopte quatre signes d’obstacles (cassis, virage, passage à niveau, croisement). En 1928, il y a déjà 700 voitures par jour entre Paris et Orléans, la route la plus empruntée. L’année 1930 marque l’apogée du réseau national: il y a 40 000 km de routes nationales auxquelles on ajoute 40 000 autres kilomètres de voies départementales ("nouveau réseau") reclassées en nationales afin d’accélérer leur modernisation.

Deux ans plus tard, c’est l’apparition de la ligne jaune (continue ou discontinue) qui va convenablement séparer les sens de circulation et l‘instauration de routes prioritaires. En 1938, apparaissent les départementales (fusion des GC restants et des IC). "L’âge d’or" des routes nationales françaises va se poursuivre jusqu’à la fin des années cinquante (hors épisode 39-45 qui va ravager le réseau national). La densité du réseau semble suffisante pour faire face à l’augmentation de la circulation, et, hormis quelques retouches (déviations de villages, chaussées à trois voies), les ingénieurs français ne souhaitent pas intégrer dans l’Hexagone ce modèle révolutionnaire de chaussée qu’est l’autoroute...

Le déclin de la nationale comme mode de déplacement principal date de 1961. La congestion des axes demande un effort immédiat. Cette année-là, le gouvernement décide de mettre en chantier 110 km d’autoroutes par an. Le millième km sera atteint en 1968. Les grandes chantiers se concentrent tout d'abord sur l’autoroute de Normandie, l’A1 Paris-Lille ou l’autoroute du Soleil qui emmène le vacancier dans le Midi. Et les premiers tronçons de nationales commencent à être rétrogradés en RD dès 1970. En 1972, une grande vague de déclassement touche les nationales à vocation régionale. La loi de décentralisation d’août 2004 porte le coup de grâce aux nationales historiques, désormais pratiquement toutes doublées par une autoroute (payante). Il y a en France, en 2006, 10 843 km d’autoroutes, dont 8236 km concédés. En 2009, rouler sur une "route nationale historique" (un grand itinéraire déclassé) n’est plus une nécessité, mais un plaisir, recherché par les amateurs de "voyages lents"!!

Marc Verney, Sur ma route, avril 2009


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