Borne de la R.N.3 à Livry-Gargan. Elle se trouve non loin de la route, dans le parc du château (photo: MV, février 2013).
Plaque de rue à Livry-Gargan. On y fait mention de la R.N.3 (photo: MV, février 2013).

Sources et documents: Atlas des grandes routes de France (carte Michelin, 1959); 150 km autour de Paris (carte Michelin n°97, 1970); Les belles routes de France de Paris à l’Alsace et à la Lorraine (n°302, Michelin, 1953-54); Paris-Compiègne (carte IGN Top 100 n°109, 2011); Sorties de Paris (carte Michelin n°100, 1965); Paris-Reims (carte Michelin n°56, 1958); Bobigny-banlieue rouge, Annie Fourcaut, Les Editions ouvrières (1986); Bondy et sa forêt, Maurice Baurit, Editions IGC St-Etienne-Paris (1961); Claye-Souilly, chronique d’une ville, Jacqueline Caudal-Vaïsse, éditions Amatteis (2006); Claye-Souilly et ses environs, Société d’histoire de Claye, éditions Amatteis (1985); Claye-Souilly, histoire d’un village de la vieille France, Société d’histoire de Claye et de ses environs (2006); Dictionnaire topographique et historique des rues de Meaux, Société littéraire et historique de la Brie (1999); D’une rue à l’autre, (dictionnaire des rues de Château-Thierry) Etienne Bourgeois, impr. Reims-Copie (2005); Etat des communes: Bobigny, notice historique et administrative, sous les auspices du conseil général de la Seine, Montévrain-impr. typographique de l’école d’Alembert (1899); Etat des communes: Les Pavillons-sous-Bois, notice historique et administrative, sous les auspices du conseil général de la Seine, Montévrain-impr. typographique de l’école d’Alembert (1906); Guide Bleu de la France automobile (Hachette, 1954); Guide Bleu des environs de Paris (Hachette, 1928); Histoire de Meaux et du pays meldois, A. Carro, Res Universis, 1989 (rééd. 1865); La Ferté-sous-Jouarre, Dr Yves Richard, éd. Fiacre (2011); La Ferté-sous-Jouarre et ses environs, R.C. Plancke, éd. Amatteis (1986); La Seine-Saint-Denis, hier et aujourd’hui, Guy Martignon, SIDES (1998); Les Pavillons-sous-Bois, des origines à nos jours, Jean Astruc, SHRPA, impr. Cavillon (1978); L’histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, Georges Reverdy, Presses de l’ENPC (1997); Nos vieux murs: Château-Thierry, Georges Pommier, Librairie moderne L. Marchand (1923); Pantin, 2000 ans d’histoire, Roger Pourteau, Temps actuels (1982); Trilport, témoin de l’histoire, Michèle Bardon, Presses du Village (2007); notre-dame-villeparisis.ouvaton.org; st-jean-les-deux-jumeaux.fr; vaujours.fr; ville-pantin.fr; Wikipédia; Wikisara.

Signalisation Michelin de la RN3 à côté de Meaux en direction de Trilport. En 2013, ces panneaux sont encore en place (photo: MV, oct. 2006).

D'autres ressources autour de la nationale 3 historique: La page Wikisara consacrée à cette ancienne nationale française (lire).
La page Wikipédia de la RN3 historique (lire).

Une page sur les routes de Seine-et-Marne (lire)
Patrimoine routier de Seine-et-Marne (lire)


Localités traversées par la N3 (1959):
Paris, porte de Pantin
(boulevard périphérique)
Pantin
Bobigny (N186)
Bondy
Les Pavillons-sous-Bois
Livry-Gargan
Vaujours
Villeparisis
Claye-Souilly
Meaux (N36)
Trilport
Saint-Jean-les-deux-Jumeaux
Sammeron
La Ferté-sous-Jouarre (N33)
Montreuil-aux-Lions
Paris
Le Thiolet
Vaux

Château-Thierry (N37)

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A Trilport, on a changé le cartouche de la route nationale 3, mais pas les panneaux, qui sont un peu défraîchis (photo: MV, mars 2013).
A Château-Thierry, on célèbre partout Jean de La Fontaine... une rue, un musée dans sa maison natale, une statue (photo: MV, avril 2013).

Ecrit par Victor Hugo à l’occasion d’une promenade sur la route de Meaux: «Ce ne sont pas les événements que je cherche en voyage, ce sont les idées et les sensations; et, pour cela, la nouveauté des objets suffit. D’ailleurs, je me contente de peu. Pourvu que j’aie des arbres, de l’herbe, de l’air, de la route devant moi et de la route derrière moi, tout me va. Si le pays est plat, j’aime les larges horizons. Si le pays est montueux, j’aime les paysages inattendus, et au haut de chaque côte il y en a un.» (Le Rhin, Lettre I, 1842).

Aller «par terre». Au XVIIIe siècle, les grandes routes autour de Paris sont toutes pavées. On lit dans l’ouvrage Bondy et sa forêt de Maurice Baurit qu’il était cependant fortement recommandé aux postillons d’aller avec leurs diligences «par terre» par temps sec, c’est-à-dire de rouler sur la zone non pavée de la route, car on y allait beaucoup plus vite et sans les secousses désagréables causées par le pavé.



Belles routes de France...
RN3: PLEIN GAZ SUR LA ROUTE D'ALLEMAGNE (I)
En 1959, la route nationale 3 (R.N.3) suit la Marne jusqu'à Châlons-en-Champagne (à l’époque, on dit Châlons–sur-Marne). C'est par là, entre Meaux et La Ferté-Milon, en des lieux aujourd’hui apaisés, que les troupes françaises de 1914 ont arrêté l'envahisseur allemand en marche sur Paris. Des guerres et des batailles, la route en a vécu: la Marne, Verdun, l'Argonne, Gravelotte... De 1814, 1870 à 1939-45 en passant par 14-18, la même bêtise humaine... La route, maintenant pacifiée, mène à Metz, la belle cité à l'architecture si surprenante... et passe par Epernay, capitale du champagne. Attention aux bulles!! En ce printemps 2013, nous voilà de nouveau sur cette «route d’Allemagne», à l’affût de sa très riche histoire, car nous allons y rencontrer un roi en fuite, un poète facétieux et un généralissime intraitable… Première partie: de Paris à Château-Thierry, soit 85 km.

La nationale 3 après Meaux (Photo: Marc Verney, mars 2013). En cliquant sur l'image vous suivez la suite de la promenade sur la R.N.3 historique!


PERIPHERIQUE PARISIEN, L'ANNEAU MAJEUR
Avant de sortir de Paris, un petit tour sur le boulevard périphérique de la capitale? On y rencontre du béton, du métal et du plastique. Des gens, aussi... (lire)

La route nationale 3 de 1959 s'extirpe de Paris à la porte de Pantin (également appelée porte d’Allemagne jusqu’au début du XXe siècle). A l’époque de mon premier passage, en 2006, tout y «sentait» bon la société automobile «avancée» depuis les embouteillages quasi incessants de l'avenue Jean-Jaurès (anciennement grand chemin de Meaux) jusqu'aux imposants piliers de béton gris du périphérique. Aujourd’hui, en 2013, un nouveau venu s’installe, imposant un aménagement urbain bien spécifique: le tramway des Maréchaux, ce symbole d’un temps qui reste encore à construire…

Sortie de Paris par la porte de Pantin en 2005. Les lieux ont bien changé avec l'arrivée du tramway (photo: MV, décembre 2005).

Bon, nous voici, comme à pratiquement toutes les portes de Paris face à un axe gonflé d’histoire. Le site internet de la ville de Pantin évoque une voie «d’origine antique» sans apporter cependant de preuves archéologiques. Pour sa part, le livre Pantin, 2000 ans d’histoire dit qu’au IIIe siècle, se construit ici la route Lutèce-Trèves via Reims, tracée par l’empereur Julien. Au Moyen Age, raconte encore le site de la ville, le statut de «première importance» de cette voie semble bien prouvé par les léproseries qui «la jalonnent jusqu’au XIVe siècle à Pantin, Bondy, Vaujours» et par «la coïncidence de son tracé» avec la poterne Barbette, une des portes de l’enceinte de Philippe-Auguste, au débouché de la rue Vieille-du-Temple. Dans La Seine-Saint-Denis, hier et aujourd’hui, Guy Martignon décrit, de son côté, un territoire, au moment de la conquête romaine, «constellé de marais qui stagnaient en bas du chemin qui menait à Romainville». Pour sa part, Georges Reverdy, dans L’histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, cite un ouvrage de 1552, La Guide des chemins de France, qui donne un itinéraire Paris-Nancy par Meaux, Château-Thierry et Epernay.

Le bourg de Pantin (de paintain, marécage au XIe siècle) ne s’étoffe pourtant qu’à la deuxième moitié du XIXe siècle. On y fabrique alors aussi bien de la chaudronnerie, des allumettes, des parfums, des tabacs… le tout se mêle aux odeurs de l’équarrissage et des rues… Les fameuses «odeurs de Pantin» inondent l’est parisien de leurs effluves peu distingués! En 1928, d’après le Guide Bleu des environs de Paris, la R.N.3 est mal pavée jusqu’à Pantin, «bon pavé ensuite sur 26 km»…

Extrait de l'Atlas de Trudaine (XVIIIe siècle) pour la généralité de Paris. On y voit le bourg de Pantin, placé sur le chemin de Meaux (source: culture.gouv.fr).

Plus loin, l'immense région parisienne développe toujours et encore son décor mercantile, utilitaire et industriel... Voilà maintenant Bobigny, que la R.N.3 traverse sur 2862 m exactement et dont l’existence est avérée en 700. Les profondes transformations de Bobigny datent de l’orée du XXe siècle et de l’arrivée (en 1902) du tramway reliant le quartier de l’Opéra au carrefour des Six-Routes, un peu au nord de notre trajet. Les anciennes cultures maraîchères, nous raconte le livre Bobigny-banlieue rouge disparaissent dès les années 20, remplacées par des industries chimiques, des fabricants d’ampoules électriques, de postes de radio…

Bondy sera le premier relais de diligences rencontré depuis Paris. Appelé le Cygne de la Croix, il comptait, à la fin du XVIIIe siècle, de 60 à 70 chevaux. Ces terres boisées furent exploitées, nous narre La Seine-Saint-Denis, hier et aujourd’hui, «dès l’époque gallo-romaine». Les anciens chemins qui traversaient cette région deviendront, selon l’ouvrage Bondy et sa forêt, «les routes de Lagny et de Meaux». Au XIIe siècle, un péage est installé par le roi Charles VI sur la chaussée de Meaux. A l’époque, la traversée de la forêt de Bondy n’est pas sûre et des gardes accompagnaient les marchands depuis la Mainferme, un manoir fortifié situé sur l’ancienne route de Lorraine, placée un peu au sud de l’itinéraire de la R.N.3 de 1959 (un nouveau chemin sera tracé en 1636). Amusant: les nombreux étangs de la région produisaient un «poisson de Bondy» réputé sur les marchés parisiens. En 1913, il ne reste qu’une dizaine de mares… C’est la mise en service, en 1825, du canal de l’Ourcq, tout proche, qui a lancé le développement industriel de Bondy.

Le territoire des Pavillons-sous-Bois ne devient commune qu’en janvier 1905. Ce n’est auparavant qu’une partie de Bondy, appelée Bondy-la-Forêt. Après 1770, à l’orée de l’avenue qui mène au château du Raincy, acheté par le duc d’Orléans en 1758, on édifie deux pavillons qui serviront d’entrée à la propriété. La route y est pavée en 1788. Le carrefour portera alors le nom de Fourche des Pavillons. On peut lire dans l’Etat des Communes: Les Pavillons-sous-Bois que la R.N.3 en 1906 y est large de 7,50 m (chaussée pavée) avec «des trottoirs sablés plantés de peupliers». Dans le coin, on trouvait la Voierie de l’Est, un espace où l’on a transformé les matières fécales des Parisiens en engrais de 1848 à 1905 (odeurs, quand tu nous tiens!).

A Livry-Gargan, ce majestueux cèdre, planté sous Louis XV a miraculeusement survécu aux aléas de la R.N.3 (Photo: Marc Verney, février 2013).

«C’est sous le nom de Livry-en-l’Aulnoye qu’on trouve la mention de la commune de Livry-Gargan dans les textes du XIIe siècle», découvre-t-on dans le livre Livry-Gargan et son histoire. La région était donc autrefois couverte par cette vaste forêt de Bondy qui, au XVIIIe siècle encore, débutait à deux lieues des limites de Paris. On dit que le Dauphin, fils de Louis XIV adorait y chasser. Un arrêté de 1699 y ordonna le percement d’une trentaine de nouvelles voies ainsi que la construction de ponceaux et de fossés pour y améliorer l’écoulement des eaux. Un château, sans doute bâti à partir du XIe siècle pour garder la route d’Allemagne, se trouvait, là, à Livry, au milieu du XVIIe siècle, dans un grand parc entouré de murs.

A la fin du XVIIIe tout comme au cœur du XIXe, la route vers l’Allemagne est en piètre état. Elle est même, lit-on dans Livry–Gargan et son histoire, «presque impraticable en hiver et lors de fortes pluies». En cause encore, la forêt de Bondy, peu défrichée… Mais l’activité industrielle frénétique de la région parisienne va rapidement faire disparaître ces ultimes arpents de verdure. C’est notamment l’entrepreneur Louis-Xavier Gargan qui investit lourdement dans la région. Une scierie, installée en 1863, s’adosse à ses usines de construction ferroviaire. Il y a aussi des fabriques d’allumettes, une tonnellerie (qui façonne les tonneaux destinés aux premières raffineries de pétrole des environs de Paris)… Enfin, à partir de 1875, une voie de chemin de fer (la ligne des Coquetiers) à but industriel mais transportant aussi des voyageurs favorise l’installation de milliers de travailleurs parisiens dans la région. Un vrai miracle qu’un cèdre planté sous Louis XV ait survécu juste au bord de la route nationale… En 1912, en hommage à l’industriel qui a tant «contribué» à l’essor économique de la région, Livry devient Livry-Gargan…

A Vaujours et Villeparisis, la chaussée moderne (D603 en 2013) évite depuis la fin des années 60 l’ancien tracé de la route d’Allemagne historique (que l’on retrouve en suivant la D44). Vaujours est, jusqu’au début du XXe siècle, un village de «pailleux» (négoce du foin) mais aussi -encore maintenant- un haut lieu de la production de plâtre (il y a de l’excellent gypse dans les sous-sols). Henri IV y possédait un pavillon de chasse (du coup on en garde la trace avec le lieu-dit du Vert-Galant). A côté, Villeparisis se trouve dans le département de Seine-et-Marne. Ce «village devenu ville», puise ses origines, nous dit le site notre-dame-villeparisis.ouvaton.org, dans la tribu gauloise des Parisii. Profitant d’un chemin communicant avec la tribu voisine des Meldes, des agriculteurs s’y installent jusqu’au Moyen Age. La route, nous dit d’ailleurs le Guide Bleu de la France automobile de 1954 y «débouche enfin dans la campagne».

A Meaux, la route de Paris en Allemagne entre dans la ville en enjambant le canal de l'Ourcq, qui "s'enroule" autour de la N3 depuis Paris (Photos: Marc Verney, mars 2013).

En roulant 5 km à l’est, voilà Claye-Souilly, où la route retrouve le très pittoresque canal de l'Ourcq, initié par Napoléon Bonaparte, alors Premier consul, en 1802. Jadis, nous narre Claye-Souilly, histoire d’un village de la vieille France, on trouvait là un gué sur la Beuvronne, rivière qui était (au quaternaire) le lit de la Marne… Au temps du cheval, la ville était un relais sur la voie d’Allemagne (106 bêtes quand même!). On y trouvera même, durant le XIXe siècle, la «maison de repos» de milliers de chevaux de la Compagnie générale des omnibus! La ville va être façonnée par la route: en 1721, un arrêté royal propose l’élargissement de la chaussée. Des travaux qui seront menés entre 1754 et 1806. A cette époque, le tracé de la route d’Allemagne est d’ailleurs aussi sensiblement modifié par la construction du canal de l’Ourcq. La chaussée de Meaux, située rue de Charny, est donc détournée et sera bâtie sur les remblais du nouveau canal (l’avenue Aristide-Briand, auj. D422).

En juillet 1839, un décret pris en Conseil d’Etat décide de la fusion des communes de Claye et de Souilly. Entre 1825 et 1855, apprend-t-on dans Claye-Souilly et ses environs, on pourra voyager sur l’eau pour aller à Paris. Enfin, la ligne de chemin de fer entre Paris et Meaux ouvre en 1849. Beaucoup plus tard, à l’ère automobile, Claye-Souilly sera contournée par la R.N.3 au début des années 60. Jusqu’à Meaux, il y a 15 km quasiment en ligne droite. La voie est pavée depuis la fin du XVIIIe siècle; des aménagements visant à adoucir trois buttes dangereuses et raides y seront effectués à partir de 1780, découvre-t-on dans L’Histoire des routes de France, du Moyen-Age à la Révolution.

En bas de l'avenue Gallieni (à gauche de la photo) se trouvait, à Meaux, la porte de Paris (Photo: Marc Verney, mars 2013).

Logée aux avants-postes de la Brie, à 44 km de Paris, la cité de Meaux fut longtemps un important marché de victuailles approvisionnant la capitale. Aujourd'hui, peu à peu aspirée par l'imposante agglomération parisienne, Meaux devient une cité périphérique accueillant des Franciliens à la recherche de loyers moins élevés... La cité de la tribu celte des Meldes, rattachée au royaume de France en 1285 a un long passé historique: les Romains, constate-t-on dans l’Histoire de Meaux et du pays meldois, y bâtissent une forteresse pour protéger la navigation sur la Marne mais aussi le pont qui portait la voie de Sens à Senlis.

On entre dans la ville par la rue de la Chaussée-de-Paris. Les environs ont été fortement modifiés avec la réalisation du canal de l’Ourcq, au début du XIXe siècle. Les immeubles de l’avenue Gallieni, nous précise le Dictionnaire topographique et historique des rues de Meaux, ont été bâtis au moment du chantier et la chaussée a été ici «rehaussée plusieurs fois». En bas de l’avenue Gallieni, se trouvait l’ancienne porte de Paris, une entrée fortifiée précédée d’une zone inondée qu’il fallait franchir à l’aide de plusieurs petits ponts (une partie entièrement comblée au début du XIXe siècle).

A VOIR, A FAIRE

Non loin de la cathédrale Saint-Etienne (XIIe siècle), le jardin Bossuet, agencé à l’image d’une mitre épiscopale est considéré comme une œuvre de jeunesse d’André Le Nôtre. On peut encore voir une partie des remparts gallo-romains. Enfin, le Monument américain, inauguré en 1932, commémore la bataille de la Marne. Il jouxte un musée de la Grande Guerre; celui-ci souhaite proposer une nouvelle approche du conflit 1914-18 (causes, déroulement, héritage). En 1914, l’avance allemande est stoppée dans la région par la résistance des armées commandées par le général Joffre.

R.N.36: TRANCHE DE BRIE
De Villers-Cotterêts à Melun, voilà une promenade tranquille dans un coin de Brie peu fréquenté sur une chaussée royale au tracé unique (lire)

On quitte Meaux par la rue du Faubourg-Saint-Nicolas. Cet axe est très ancien. Le Dictionnaire topographique et historique des rues de Meaux nous raconte qu’il s’appelait rue du Tril (un nom dérivé du latin trajectus, ce qui évoque le trajet). Pavée au XVe siècle, la rue est entièrement refaite au XIXe. Au bout d’une longue et majestueuse allée longée d’arbres, pavée ici en 1723, la route d’Allemagne atteint Trilport et la Marne. Evoqué par La Guilde des chemins de France, il y avait là un gué jusqu’au XVIIe siècle. Remplacé par un premier pont en bois puis par un pont en pierre en 1757. Mais celui-ci est détruit en 1814. Un nouvel ouvrage (à péage) est achevé en 1831. Il sautera encore en 1914 et 1940 puis sera élargi en 1986.

La nationale rejoint les bords de la Marne à Saint-Jean-les-deux-Jumeaux, où se trouvait la poste aux chevaux. A noter, indique le site du village, que la route entre Trilport et St-Jean passait -jusqu’au percement de la chaussée royale sous Louis XV- par la forêt domaniale de Montceaux. Plus loin, la R.N.3 de 1959 traverse le bourg de Sammeron. Et voilà La Ferté-sous-Jouarre. La petite cité, au confluent de la Marne et du Petit-Morin, dont le nom est cité pour la première fois en 1109, fut longtemps un des hauts lieux mondiaux de la production de meules en pierre destinées à moudre le grain. Au XIXe siècle, le bourg compte 23 entreprises fabricant des milliers de meules partant en bateau ou en chemin de fer dans le monde entier!

Ville étape sur la route d’Allemagne, trois voitures quotidiennes en partent pour Meaux et Paris en 1827; par ailleurs, deux hôtels y sont signalés par le guide Joanne en 1883, l’hôtel du Porc-épic et celui de Paris. La route vers la capitale y est pavée avant 1911.

A VOIR, A FAIRE

On peut jeter un œil intéressé à l’ancien port aux meules de la cité dont le quai est formé de 500 meules abîmées, ou inutilisables pour les moulins.

La route nationale 3 historique à Montreuil-aux-Lions (photo: MV, octobre 2006).

L’histoire de la route après La Ferté-sous-Jouarre est plus mouvementée: ainsi, voit-on dans l’Histoire des cantons de l’Aisne que la chaussée suivait primitivement la vallée de la Marne jusqu’à Château-Thierry. Charly étant équipé d’un relais de poste et d’hôtelleries. Mais, au milieu du XVIIIe siècle, on réoriente la route d’Allemagne par Montreuil-aux-Lions et le plateau de l’Orxois. De ce fait, nous signale l’ouvrage La Ferté-sous-Jouarre, «la route, qui monte par la côte de Bécard, est mise en service en septembre 1755 après cinq ans de travaux». Mais, quelques années plus tard, vers 1785, la route d’Allemagne passe par Montmirail (anc. R.N.33), lors de la mise en service d’un tronçon plus court de 13 km jusqu’à Châlons. Louis XVI, en fuite, passera par là. Mais le tracé par Montreuil-aux-Lions sera ensuite à nouveau réemprunté par la R.N.3 jusqu’à nos jours. En 1932, à la hauteur du hameau de Bécard, on trouvait un café-épicerie qui s’appelait joliment Au repos de la montagne (La Ferté-sous-Jouarre et ses environs).

R.N.33: UN AIR D'EMPIRE
La route nationale 33 va de la Ferté-s-Jouarre à Châlons. Des plaines marquées par le sang des ultimes batailles de Napoléon en 1814...(lire)

A Montreuil-aux-Lions, la route entre dans le département de l'Aisne (D1003 auj.). Le lieu-dit La Ferme-Paris est un des relais de diligences sur la voie vers l’Allemagne. Voilà maintenant Château-Thierry qui s’annonce. Si les Gaulois, découvre-t-on dans le dictionnaire des rues de Château-Thierry D’une rue à l’autre, furent les premiers occupants des lieux, un château-fort, imaginé par Charles Martel -qui habita l’endroit- s’y construit à partir du IXe siècle, contrôlant l’axe principal à cette époque, une voie d’origine romaine reliant Troyes à Soissons. Après les fortifications, réalisées au Xe siècle, l’agglomération s’élargit vers la Marne aux XIIe et XIIIe siècle. A l’époque, la rivière pouvait avoir plus de 100 m de large et il n’y avait qu’un gué pour la traverser.

A VOIR, A FAIRE

Le poète La Fontaine est omniprésent dans la petite cité de Château-Thierry car il en est originaire. On dit que la fable «Le coche et la mouche» est directement inspirée d’une expérience vécue sur la route de Paris. Un musée, créé dans la maison natale du fabuliste peut être visité. Dans le centre-ville, la tour Balhan est classée monument historique depuis 1926. Dominant de 45 m la vallée de la Marne, la butte qui héberge le vieux château est un lieu de promenade et héberge un spectacle de fauconnerie. La ville a été le théâtre d’une importante bataille en 1814; elle a été aussi l’un des lieux clés de la guerre de 1914-18 avec les combats victorieux des forces américaines présentes en France lors de la deuxième bataille de la Marne (juillet 1918). Un monument-mémorial (inauguré en 1933) domine Château-Thierry à la Cote 204.

Vue générale de Château-Thierry. On voit parfaitement que l'axe actuel de la ville est tracé sur les fondations de l'antique "chaussée Brunehaut" (photos: Marc Verney, avril 2013).

En 1959, on pénètre dans Château-Thierry par l’avenue de Paris et la place de la Bascule (auj. Aristide-Briand). On y trouvait l’octroi. Petite anecdote: les habitants surnomment les lieux «place de la Girafe», car, en 1832, un voyageur qui roule en direction de Paris y débarque dans une auberge accompagné de la vraie bête au long cou… Une petite fresque (encore en place en 2013) retrace l’événement! Du centre-ville, une levée, bâtie en 1766, conduit aux abords du pont. Cette chaussée surélevée restera longtemps isolée, au milieu de mares pestilentielles, jusqu’à leur comblement en 1830. C’est aujourd’hui la place des Etats-Unis.

Mais, on a pu le lire plus tôt, la route d’Allemagne, jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, empruntait les bords de la Marne en croisant Chézy, Nogentel, Etampes et Chierry, passant donc au large de Château-Thierry. C’est en tout cas ce que l’on peut découvrir dans l’ouvrage Nos vieux murs : Château-Thierry. Après le remaniement routier, qui fait passer la route d’Allemagne par Montreuil-aux-Lions et éviter la vallée de la Marne, souvent submergée, la voie emprunte le cheminement de 1959 et traverse la rivière sur un ouvrage qui tire ses origines des temps anciens.

On peut suivre encore aujourd'hui la route par la vallée de la Marne, qui est désormais un itinéraire touristique (photo: Marc Verney, avril 2013).

Le pont en bois du XIe siècle
, restauré par les comtes de Champagne au XIIe siècle est remplacé sous François Ier par un pont à neuf arches disposant, au centre, d’un plancher mobile permettant la circulation des bateaux. Un nouveau est encore bâti entre 1767 et 1788. L’actuel date de 1950 et fait suite aux destructions des deux guerres mondiales. Au XVIIIe siècle, l’ouvrage est prolongé par une chaussée surélevée aux origines antiques. Celle-ci traversait toute la vallée de la Marne; ses nombreuses arches permettaient l’écoulement des eaux de la plaine à l’occasion des fortes crues. Plus loin dans ce faubourg, un pont «saute» la «fausse Marne», un fossé creusé vers 1760 et qui permet de mieux drainer les eaux de la plaine. A la moitié du XVIIIe siècle, la chaussée Brunehaut antique est remplacée par une avenue plantée d’ormes aboutissant à une place en demi-lune (actuelle place Carnot) d’où part vers l’est l’avenue de la République, qui nous indique la sortie de Château-Thierry et la suite de la R.N.3 historique vers Epernay (continuer).


Marc Verney, Sur ma route, mai 2013

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AU FIL DE LA ROUTE NATIONALE 3
Les régions du nord et de l'est de la France recèlent de nombreuses traces des routes anciennes... Le voyageur qui zigzague entre anciennes nationales et nouvelles départementales le sait bien... (lire)