Douzième étape: Saint-Laurent-en-Grandvaux-la Faucille
KM 468: CURE FRANCO-SUISSE
Le bourg-frontière de la Cure est le royaume des "trafiquants" de chocolat suisse. Du soir au matin, les rues de ce petit village sont parcourues par des hommes et des femmes aux bras chargés de multiples tablettes. Et les douaniers laissent faire... En plus, la Cure cache une étonnante spécificité géographico-culinaro-politique: l'Arbézie...

Mur indicateur peint sur une ancienne ferme de la Cure. On peut y lire: "Genève, la Savoie, direct par la Faucille, panorama grandiose, Gex, centre de tourisme..." le reste est illisible. Tout a disparu dans les années 2010 (Photo: Marc Verney, avril 2006).


Un petit tour sur la N5A et vers la Suisse (lire)

C'est quoi l'Arbézie? Voilà une jolie histoire à lire dans le Canard Enchaîné, l'hebdo satirique français. Il existe à la Cure un restaurant (Chez Arbez) situé à cheval sur la frontière entre France et Suisse. L'histoire remonte, raconte le journal (16 août 2006), au traité des Dappes de 1862. Français et Helvètes décident de rectifier la frontière entre les deux pays. Manque de bol: le tracé coupe le champ d'un certain Ponthus. Malin, il décide d'en profiter et y construit juste avant la ratification de l'accord une baraque qui servira à héberger son petit trafic transfrontalier. Or le traité indique "qu'il ne portera aucune atteinte aux droits acquis au moment de l'échange des ratifications". Le "magasin Ponthus" a donc une façade en France et l'autre en Suisse... Pratique! Revendu à Jules-Joseph Arbez en 1921, l'hôtel de la Frontière devient Franco-suisse. En 1940, la spécificité de l'endroit le place au coeur du second conflit mondial: les Allemands, explique encore le Canard "n'ont pu voir que la partie française du bar et de la salle à manger; en outre, l'escalier démarre en France mais la septième marche est en Suisse, ce qui rend inaccessible le deuxième étage..." L'enclave, qui se situe juste à côté du début de la ligne de démarcation est un haut lieu de la Résistance!
Plus tard, l'accord trouvé entre France et Suisse rend les choses encore plus étonnantes: les autorités françaises considèrent le bâtiment comme suisse et les officiels suisses comme français... Résultat, rigole le Canard, "une extraterritorialité simple". Edgar Faure, un ancien politique local donnera même le nom de cette étrangeté: l'Arbézie... Aujourd'hui, on peut y dormir la tête en Suisse et les pieds en France...

A gauche, au-dessus du poste frontière suisse, les services helvétiques de l'équipement ont installé ce panneau (à droite) inspiré de la signalisation française. Genève peut être atteinte depuis la Cure à la fois par le col de la Faucille (N5) mais aussi par Saint-Cergue et Nyon. A droite, la plaque des douanes suisses (Photos: Marc Verney, avril 2006).